home |
Facteurs de pianos en France
PARIS - "Mais c'est à MM. Roller et Blanchet, boulevard Poissonnière, n° 10, que les dilettants devront des actions de grâces, pour leur invention du piano droit ou vertical, qui occupe à peine le tiers de la place d'un piano carré, et qui rend des sons comparables à ceux des grands pianos à queue.
Les touches en sont peut-être
un peu dures; mais l'instrument est neuf, et notre main n'est pas
très-exercée.
Au reste, il n'y a qu'une voix sur cette importante
amélioration qui nous restituera une partie de nos salons, laissera plus
d'espace aux danseurs, et donnera par conséquent plus de mouvement à nos
soirées.
Le meuble est agréable à l'œil, l'accord est solide, et les cordes
résistent à l'effort le plus violent des touches, parce que les marteaux
attaquent au-dessus du sillet. Nous pensons que ces
pianos ne tarderont pas à se multiplier dans toutes nos réunions
d'hiver."
Histoire
de l'Exposition des produits de l'industrie française en 1827, Adolphe-Jérôme
Blanqui, M. Blanqui, Blanqui (Adolphe-Jérôme), A la Librairie du commerce,
chez Renard, 1827
Ce
piano, à trois cordes, est un peu plus haut que les pianos ordinaires, mais
il est d'un bien plus petit volume; le son eu est bien nourri, franc et
vigoureux comme celui qu'on obtient de toutes les tables d'harmonie placées
verticalement. En outre, les marteaux attaquent en-dessus du sillet, ce qui
rend les cordes beaucoup plus résistantes aux efforts des touches.
On peut
adapter à ce piano la transposition, mécanisme au moyen duquel on peut, en
un tour de clé, monter ou descendre le diapason d'un ou de plusieurs tons.
Ces perfectionnemens sont d'une grande importance; mais, dans ce piano, la
condition essentielle de réunir l'utile et l'agréable, n' est pas remplie.
La forme n'en est pas gracieuse et déplaît généralement comme meublant mal;
et s'il était porté à un prix plus bas que celui du tarif (1600 et 1800 fr.), il serait plutôt
destiné à prendre place dans le modeste cabinet de l'artiste qu'à orner un
salon."
Journal des artistes, 01/07/1827, p.
558-560 (gallica.bnf.fr)
The upright piano-forte is scarcely known in France, on account of its necessarily being placed against the wall, and, consequently, of the performer's back being turned to the company.
The instrument now spoken of, is, however,
vertical, not occupying one-fourth the space required for veu a square
instrument, and so low as to admit of the performer being seen over it. This
has excited vast attention, and promises to be very successful."
The Harmonicon, 1828, p. 6
La largeur de l'instrument n'est que de 17 pouces;
sa longueur de 4 pieds. Un volume aussi peu considérable suffit pourtant à
loger les cordes des six octaves, la mécanique, le clavier, les pédales,
etc.
Ce piano, quoique léger et peu volumineux, rend des sons pleins et bien
nourris, son timbre ressemble à celui que pourrait avoir un instrument de
grande dimension; la durée de ses vibrations, sans diminuer sensiblement,
peut remplier les plus longues tenues.
Le système d'échappement imaginé par
M. Roller est ingénieux, et dispose de manière que le marteau arrive sur la
corde avec toute la vivacité que lui imprime la touche; il n'est contrarié
dans sa marche par aucun frottement."
Archives des
découvertes et des inventions nouvelles faites dans les sciences, les arts
et les manufactures, tant en France que dans les pays étrangers pendant
l'année, 1831-32 (gallica.bnf.fr)
Ils ont exposé des pianos transpositeurs, des pianos à queue [???] et des
pianos droits, qui se recommandent par une construction très-soignée."
Rapport sur les produits de l'industrie française,
1828, p. 391-395
The upright piano-forte is
scarely known in France, on account of its neccessarily being placed against
the wall, and, consequently, of the performer's back being turned to the
compagny.
The instrument now spoken of, is, however, vertical, not occupying
one-fourth the space required for even a square instrument, and so low as to
admit of the performer being seen over it. This has excited vast attention,
and promises to be very succesfull."
The Harmonicon, 1828, p. 6
M. Pape n'a rien qui lui soit propre dans la facture de ses pianos; ce ne sont
en général que des imitations du système de M M. Petzold et Pfeiffer; mais
la qualité de son est agréable, quoiqu'elle soit un peu lourde et empatée.
M. Roller n'est pas un simple ouvrier, comme tant d'autres facteurs; c'est un
artiste qui connaît et qui raisonne les principes qui le guident dans sa
fabrication.
L'addition du mécanisme de la transposition inférieure ou supérieure aux
pianos ordinaires, est ce qui distingue particulièrement les siens cette
année. Mais c'est surtout à l'instrument qu'il nomme piano droit qu'il
paraît avoir attaché tous ses soins. Cet instrument mérite que nous en
analysions les détails.
L'attrape-marteau est fort ingénieux; au lieu de le placer au talon du
marteau, comme cela se pratique ordinairement, on a placé l'attrape en avant
du chevalet et de l'échappement- sur la touche, et un autre est fiché de
manière à ne pas cogner sur l'échappement derrière le manche du marteau.
Quand celui-ci retombe, la touche n'est pas encore revenue à son repos et
les deux attrapes viennent se prendre mutuellement.
(Je pense qu'à cet égard M. Roller est dans l'erreur. Que l'action soit
moindre, cela peut se concevoir; mais qu'elle soit nulle, cela est
impossible, car le chevalet élevant nécessairement la corde pour lui donner
l'intonation et la sonorité, celle-ci fait un angle avec le point d'attache,
et opère une action qui est d'autant plus grande que l'angle est plus aigu,
que le diapason est plus élevé, et que le volume de la corde est plus
considérable.
La position dfoite ou verticale dé l'instrument ne peut détruire cette action
; je dis même plus; c'est qu'il faut qu'elle existe, et que c'est d'elle que
résulte la sonorité. D'ailleurs, le marteau opérant, dans le piano vertical,
un refoulement sur la corde, au lieu de la pousser en haut, comme dans les
pianos ordinaires, il y a nécessairement une action momentanée, faible à la
vérité, mais qui est réelle, tandis qu'elle est à peu près nulle dans la
forme horizontale.)
VALENCIENNES -
"Piano de MM.
ROLLER et BLANCHET, à Paris (médaille d'argent). Le clavier forme une saillie de huit pouces. Un mode d'échappement très-ingénieux permet aux marteaux de frapper les cordes avec une vélocité beaucoup plus grande que celle ordinaire, vélocité qui reste constante; tandis que dans les échappemens des pianos des autres facteurs, le marteau se meut avec moins de vitesse sur la fin de sa course qu'au commencement.
Cette propriété
de l'échappementde MM. Roller et Blanchet donne au clavier une docilité
remarquable, permet d'attaquer les notes avec la plus grande énergie, ou
de toucher avec la plus grande douceur, depasser du fortissimo au
pianissimo avec la plus grande facilité. Ces précieuses qualités sont dues tant à la parfaite exécution de toutes les parties, qu'à la manière dont est placée latab le d'harmonie, qui, assujétie sur sa périphérie avec la plus grande solidité, doit vibrer sans obstacle.
Cette table,
par la bonne disposition des diverses parties de l'instrument, se trouve
plus grande que pelles des pianos carrés.
Chromamètre de MM. ROLLER et
BLANCHET, à Paris. H° 632.
Ce n'est qu'à
l'aide d'une grande habitude, qu'on peut accorder un piano d'une manière
satisfesante; en effet, il faut commencer à accorder les quintes, mais
il faut bien se garder de les rendre trop justes ; car, lorsqu'on
arriverait aux octaves, on aurait un piano horriblement faux.
On doit
lorsqu'on accorde les quintes, affaiblir un peu mais d'une manière
presqu'insensible, lesquintes successives, de sorte que la dernière note
accordée sur la quinte se trouve être exactement l'octave de la première
note accordée.
On conçoit que,
si au lieu de cet effet, on pouvait accorder les notes exactement, il
suffirait d'avoir l'oreillejuste pour être accordeur, tandis qu'il faut
avoir acquis une grande habitude, pour obtenir à chaque quinte
l'affaiblissement nécessaire. Le chromamètre de MM. Roller et Blanchet
fait disparaître complètement cette difficulté.
On peut d'abord
le mettre an diapason que l'on désire; il suffit alors de faire mouvoir
un petit mécanisme bien simple, pour obtenir tous les tons et demi-tons
d'un octave de piano; il ne reste plus qu'à accorder par octave et
exactement. Cet instrument est très-ingénieux, il remplit très-bien le
but auquel il est destiné."
Mémoires, Société d'agriculture, sciences et arts
de Valenciennes, 1833, p. 114-116
Les pianos de MM. Boller et Blanchet sont une modification
très-importante des pianos verticaux anglais. Leurs cordes sont obliques, ce
qui permet de donner aux cordes basses plus de longueur et par là plus de
son.
Il fallait, pour cette disposition, nouvelle, un mécanisme également
nouveau: celui de MM. Roller et Blanchet semble satisfaire à toutes les
conditions désirables. Les instruments de ces artistes réunissent l'élégance
et la simplicité des formes au fini parfait de l’ exécution.
Présentés à
l'exposition de 1827, ils ont reçu beaucoup d'améliorations pour arriver au
degré d'excellence qui les caractérise aujourd'hui. Des préventions
existaient contre ce genre de pianos, M. Roller les a vaincues : sa fabrique
occupe aujourd'hui 70 ouvriers, qui font par an 200 pianos verticaux.
Cependant plusieurs fabriques analogues ont été fondées pardes ouvriers
sortis de ses ateliers : tant est grand le nombre des instruments de ce
genre,' demandés maintenant par le public. Le jury décerne la médaille d'or à MM. Roller et Blanchet, qu'il considère comme les fondateurs d'une industrie nouvelle." Expo 1834, Rapport du jury central sur les produits de l'industrie française exposés en 1834, Charles Dupin, p. 288
PARIS -
"A la veille de la clôture, et lorsqu'on commençait déjà à déplorer
l'absence de ces habiles facteurs, MM. Roller et Blanchet ont enfin répondu
à l'appel de l'art et payé largement leur tribut. On sait que ces facteurs
ont choisi une spécialité, en ne construisant que les instrumens nommés
piano droit, et piano transpositeur.
Cependant cette forme avait un avantage sur celle des autres pianos:
c'est de se prêter a un plus grand nombre d'emplacemens.
Dans un petit appartement, où quelquefois un piano ordinaire cause de sa
largeur et de sa profondeur, est embarrassant; le piano vertical n'occupant
que la moitié de la place se range très-commodément.
L'importance de ce résultat engagea plusieurs facteurs à de nouvelles
recherches pour lui ôter ses défauts. Leurs efforts ont enfin obtenu le plus
grand succès car aujourd'hui le piano vertical est porté a un degré de
perfection qui doit satisfaire aux exigences des artistes.
Cette idée était la plus simple et celle qui devaitseprésenter d'abord.
Ce n'était d'ailleurs une innovation que dans l'application au piano; carie
clavecin perpendiculaire ou vertical existait plus de deux cents ans
auparavant (On lit dans la Revue musicale (tome VIII, page 193), que Rigoli,
de Florence, inventa, vers 1620 le clavecin vertical.
Nous ferons observer que la forme verticale du clavecin existait déjà en
1536. Car on la trouve dans la Wlusurgia de Luscinius dont la première
édition parut à l'époque que nous venons d'indiquer.).
On ignore quel est le facteur qui, le premier, a construit un piano
vertical (M. Fétis, dit (Revue musicale, tome VIII, p. 202), que le
troisième clavecin à maillet, de Marius était vertical.
Le dessin qu'on trouve dans les machines et inventions approuvées par
l'Académie Royale des Sciences (tom. III, p. 87), représente cet instrument
pris par-devant et en perspective qui, mal exécutée, peut au premier abord
induire en erreur.
Mais on n'a qu'à lire le texte qui l'accompagne, et à examiner le
mécanisme de la touche pour se convaincre que ce clavecin était horizontal
comme tous les autres du môme facteur.); mais c'est en Allemagne qu'on en a
fait les premiers essais.
Cette forme une fois établie, on modifia ces instrumens de mille
manières, tant pour l'extérieur que pour le mécanisme et la distribution
intérieure.
Dans les derniers temps on s'est surtout occupé à diiniuu^i le volume,
et à en construire d'une dimension aussi petite que possible sans nuire à la
qualité du son.
MM. Roller et Blanchet semblent sous ce rapport avoir atteint des
limites qu'on ne saurait dépasser. L'instrument auquel ils ont donné le nom
de piano droit, n'a que trois pieds de hauteur sur une largeur de quatre
pieds et une épaisseur de huit pouces, non compris la saillie du clavier qui
est de sept pouces.
C'est une victoire que d'avoir obtenu dans ces dimensions un instrument
à trois cordes et à six octaves, dont le son intense et plein ne redoute pas
la comparaison avec celui de pianos beaucoup plus volumineux. Aussi voyons
nous avec plaisir que l'usage des pianos droits se répand parmi les
amateurs.
En effet, rien de plus commode qu'un petit meuble musical de cette
espèce qu'on transporte facilement et qui se place partout où l'on veut.
Ce fut à l'exposition de 1827 que MM. Roller et Blanchet produisirent
leurs premiers essais des pianos droits. Depuis lors ils y ont apporté de
nombreures améliorations, et ils conviennent eux-mêmes que ces pianos
d'essai ne sauraient donner qu'une idée incomplète du degré de perfection où
ces mêmes instrumens sont parvenus aujourd'hui.
Des clavecins avaient déjà reçu un mécanisme transpositeurs. On trouve
mentionné un clavecin d'un Nicolas Ramarino où, par le changement de
ressorts, le même clavier servait a plusieurs tons différens par degrés
semi-toniques. Le P. Kircher en a fait la discription dans le premier volume
de sa Musurgie.
Les touches supérieures étaient divisées ou doubles, pour exprimer la
différence des dièzes et bémols (de sorte que, par exemple, ut dièze et
rébémol étaient produits par des cordes différentes). En outre le clavier
était mohile, et pouvait se transposer sept fois; ce qui faisait, d'après
l'arrangement de ce clavier, une transposition de trois tons (Praetorius,
Syntagma mus. t. II, p. 64 et 65.).
Mais l'usage de ce chevalet, plus compliqué et moins sûr que celui du
clavier mobile, fut bientôt abandonné, et l'on est revenu au premier procédé
dont la simplicité doit garantir le succès.
C'est, nous croyons, en Allemagne que les pianos ont reçu d'abord le
mécanisme transpositeur.
Un homme ingénieux pour la construction desiustrumens, sans être
lui-même facteur, le chambellan Bauer à Berlin fit construire, vers 1786, un
piano pyramidal, de huit pieds et demi de hauteur, qui, au moyen de
registres, présentait huit changeraens de sons et dont le clavier mobile se
transposait de deux tons (Gerber, nouv. Dict., art. Bauer).
M. Roller a depuis encore perfectionné son instrument, et tel qu'il le
présente aujourd'hui, il semble ne rien laisser a désirer. Si jusque la les
pianos a mécanisme transpositeur n'ont été faits qu'en petit nombre, ils se
répandent maintenant, et semblent, grâce a cet habile facteur, être destinés
a un succès complet.
Pour baisser le ton, il suffit de porter le clavier de droite à gauche;
et alors, suivant le nombre de degrés qu'on lui fait parcourir, la gamme
d'ut se change en celle de si au premier degré, de si bémol au second, et
ainsi de suite.
On peut obtenir a l'aigu la même variation : chaque tour de clef élève
d'un demi-ton, si c'est en haut, et baisse d'un demi-ton, si c'est en bas.
Chacun de ces degrés est d'un demi-ton, et a quelque degré que l'on
s'arrête, le clavier se trouve invariablement fixé.
PARIS -
"Les pianos droits, que MM. Rollier et Blanchet, rue Hauteville, n°
16, ont inventé en 1827, et qui leur ont valu la médaille d’or cette année,
étaient nombreux à l’exposition."
Le Charivari, 22/07/1834, p. 1
(retronews.fr)
Ses instrumens d'une
construction si élégante réunissent, en même tems, tous les avantages
désirables; on a paru craindre seulement que les transpositeurs soient
sujets à se déranger, ce qui présenterait non-seulement moins
de garantie, quant à la solidité, mais aussi beaucoup
d'embarras pour des réparations urgentes. (Rappel de médaille d'argent.)" Expo
Valenciennes 1834 dans
Mémoires
de la Société d'agriculture, des sciences et des arts, de
l'arrondissement de Valenciennes, 1835 (gallica.bnf.fr)
"997. Roller et Blanchet, r.
Hauteville, 16. Pianos droits à 2 et 3 cordes placées en diagonales, ce qui
donne aux basses une longueur de 5 pieds. — Pianos droits transpositeurs,
avec lesquels on peut changer le diapason de l'instrument à volonté, coûtant
200 fr. en sus des autres."
Mémorial
encyclopédique et progressif des connaissances, Volumes 4-5, François
Malepeyre, 1834
Ils se sont attachés à
rendre plus parfaits les pianos verticaux qui nous vinrent d’abord
d'Angleterre; ils y sont parvenus par deux moyens qui consistent, le premier
à tendre les cordes obliquement, ce qui donne aux cordes basses plus de
longueur et plus de son, et le second à adapter à l'instrument un mécanisme
nouveau qui satisfait à toutes les conditions désirables.
Par l'effet de
ces perfectionnemens, MM. Roller et Blanchet ont en quelque sorte créé une
industrie nouvelle, qui leur a fait accorder la médaille d’or.
Le public
recherche leurs pianos verticaux, et, quoiqu’ils en fabriquent 200 par an,
ils ne peuvent répondre à toutés les commandes."
Le musée artistique
et industriel: exposition 1834, p. 200
C'est à MM. Roller et Blanchet qu'on doit la création de ce
genre de pianos qu'on appelle droits et dans lesquels les cordes sont
obliques; ces habiles facteurs se maintiennent toujours au premier
rang, et leur établissement est aussi digne que jamais de la médaille
d'or qui lui a été accordée en 1834."
Rapport du Jury Central, Exposition, des produits de l'Industrie Française en 1839, M. Savart,
rapporteur, 1839
— Pianos. — On aime à suivre M. Roller dans
son essor industriel; il est né facteur comme on naît poète; dès sa jeunesse,
un entraînement instinctif dut le porter vers l'art qu'il était appelé à
faire grandir. Ce facteur, jeune encore, est élève de son père, qui, à
l'imitation de Sébastien Erard, se mit à établir des pianos dès l'an 1790.
Il changea tout-à-fait ce système, et il ne colla plus les parois
de ce meuble qu'après avoir établi le bâtis intérieur. Il chercha à
substituer une division correcte du chevalet à celle qui était alors fort
défectueuse, et améliora la pureté du son et la facilité de l'accord par de
nombreux changemens dans la disposition du sillet et des contre-pointes.
Nous citons les travaux antérieurs de M. Roller, parce que chaque année,
chaque mois même, apporte dans sa fabrication une innovation heureuse, et
qu'il serait difficile d'énumérer autrement tout ce que la facture ordinaire
doit à son heureuse imagination et à son ingénieuse exécution.
Nous voici arrivés à son piano transpositeur, qui fut la base de sa
réputation; mais, pour M. Roller, cette invention si remarquable n'était
plus un problème difficile à résoudre, car le mouvement du clavier à droite
ou à gauche n'exigeait que deux conditions :
1° les marteaux, parfaitement
en ligne droite;
2° les espaces des groupes de chaque note bien egaux, et,
comme je viens de le dire, ce facteur était déjà parvenu à les remplir.
M.
Roller, par cette invention, est venu en aide aux amateurs et même à
quelques professeurs, en leur rendant facile la transposition d'un ton dans
un autre.
De 1823 à 1827, M. Roller chercha à améliorer la puissance du son dans les
pianos carrés ; il échangea la place des sommiers (celui des chevilles et
celui des pointes d'attache) qu'il fabriqua en fonte.
Depuis long-temps cet
échange était pratiqué dans la facture anglaise ; mais nous croyons que
c'est à M. Roller qu'on doit l'idée de faire régner la table d'harmonie sous
une espèce de pont et qui suil-â forme du chevalet, et sur lequel les
pointes d'attache trouvent l'immobilité nécessaire à la solidité de l'accord
de cet instrument, ce qui est une des nombreuses conditions de la vibration
parfaite et de la sensibilité du mouvement des chevilles.
En 1826, vers l'époque de l'association de M. Roller avec M. Blanchet, dont
les connaissances profondes en mathématiques et en physique sont souvent
venues en aide à M. Roller, M. Blanchet, étant allé chez y remarqua un piano
vertical anglais; il s'aperçut combien il était embarrassant, placé dans le
milieu d'un salon, ou contre un mur, l'exécutant tournant alors le dos à la
compagnie.
En rejoignant son associé, il lui posa ce problème: Abaisser la
hauteur du piano vertical de manière à pouvoir le placer au milieu d'un
salon comme le piano carré sans rien diminuer des qualités qui le
distinguent. M. Roller entreprit de le résoudre, et l'apparition de ce
nouveau genre de piano fut un événement dans le monde musical.
Tous les
facteurs se mirent à copier ou à imiter les pianos droits ( ou pianos
verticaux à cordes diagonales) de Roller et Blanchet. Cette dénomination fut
donnée par l'auteur à ses pianos, pour éviter qu'on ne les confondit avec
les pianos en secrétaire ou piano de cabinet, en usage depuis long-temps en
Angleterre.
A l'exposition de 1834 on comptait presqu'autant de pianos
verticaux, de trois à quatre pieds, que de pianos carrés, et leur nombre
était peut-être encore plus considérable cette année.
Avant M. Roller, les
pianos verticaux péchaient par les basses et étaient criards dans le haut :
ils ne servaient que comme jouets d'enfans; on fut donc tout étonné
d'entendre, à l'exposition de 1827, un piano droit qui faisait plaisir et qui
était agréable par sa forme petite et élégante. Nous indiquerons à ceux qui
désireraient plus de détails sur ce piano droit l'examen qu'en a fait, d'une
façon si habile, M. F. J. Fétis dans la Revue musicale (tom. II, p. 82).
Cependant le premier mécanisme, qui paraissait alors parfait, fut loin de
satisfaire M. Roller; il l'abandonna et il le remplaça par un nouvel
échappement, supérieur à ceux des pianos verticaux anglais.
Dans ceux-ci
l'échappement est fixé sur la touche, et fonctionne dans une entaille faite
à la noix du marteau près de son pivot ; par le frottement d'un bouton sur
une partie coupée en pente, cet échappement, au fur. et à mesure qu'il monte
en poussaut le marteau vers la corde, se renverse peu à peu, quitte
l'entaille et le laisse retomber à son point de repos.
Ce décrochement est
sensible sous le doigt qui met en mouvement la touche ainsi que le
frottement du bouton sur la pente de l'échappement.
Dans le système de M.
Roller, au contraire, le jeu de l'échappement se fait sur la touche par
l'extrémité opposée; l'autre est fixée à la noix du marteau, près du pivot,
par une goupille sur laquelle il peut tourner.
Une petite équerre, mobile sur son angle, est placée à l'angle ouvert en
dedans, derrière le bas de l'échappement, à une distance nécessaire à son
jeu seulement, de telle sorte qu'une branche est parallèle a cet échappement
et lui est unie par un petit fil de cuivre.
Presqu'au bout de la touche est
une entaille et une vis à tête ronde, qu'on peut hausser ou baisser pour
régler le jeu du marteau. En posant le doigt sur la touche, l'échappement
est soulevé, en même temps, par la vis à tête ronde ; la branche horizontale
de l'équerre l'est pareillement.
Par ce mouvement, la branche parallèle à
l'échappement se renverse, l'attire à elle parle petit fil de cuivre qui y
correspond, et lorsqu'il est arrivé au bout de sa course, après avoir fait
frapper le marteau sur la corde, il retombe par son poids et celui du
marteau dans l'entaille pratiquée au bout de la touche.
Deux petits
ressorts, l'un placé devant le marteau, l'autre derrière l'équerre, ramènent
immédiatement toutes les pièces en place après leur effet.
On voit que, par
ce moyen, le marteau doit arriver sur la corde avec toute la vivacité que
peut lui imprimer la touche. Rien de l'impulsion donnée n'est affaibli ou
modifié. On peut lire avec intérêt le rapport fait à l'Institut sur cet
échappement, le 18 juin 1832, et celui de la société d'Encouragement, de la
même année. M. Roller appliqua encore à ses pianos un système nouveau
d'attrape-marteaux, qui est un modèle de simplicité.
L'échappement de M.
Roller, déjà si facultatif en 1834, a reçu encore depuis un nouveau degré
de perfectionnement. L'inventeur a abaissé le point de contact de la touche
avec l'échappement de façon que l'arc décrit par l'extrémité de celui-ci est
le plus doux possible, et que le frottement dans le jeu de ces deux pièces
importantes du mécanisme est diminué considérablement.
On peut comparer à
cet égard le dessin de l'échappement joint au rapport de l'Institut et celui
adapté aux nouveaux pianos droits de l'exposition de 1839.
Cette spécialité,
pour ainsi dire, de la facture des pianos droits, a remporté la médaille
d'or en 1834 ; au suffrage unanime du jury est venu se joindre celui des
grands artistes ; aussi nous voyons figurer au nombre des acquéreurs de cet
instrument les Berton, les Auber, les Onslow, les Désorméry, les Pradher,
les Zimmermann, les Woët, les Nadermann, les Thalberg; MM. Levasseur,
Ponchard, Ch. Plantade ; Mmes Dorus-Gras, Falcon, Rigaud et bien d'autres
encore sont venus confirmer ce jugement.
On croirait peut-être que M. Roller, satisfait d'un aussi brillant résultat,
va s'arrêter et jouir tranquillement de ses précédens travaux ; mais non, ce
facteur a compris que, dans l'industrie, s'arrêter c'est reculer : il s'est
remis au travail, et a cherché par mille moyens à résoudre cette question,
restée toujours sans solution complète, malgré les efforts de nos plus
habiles facteurs, pour qui l'Angleterre n'offre plus de rivaux.
Augmenter la
puissance de la sonorité dans le piano, de manière à ce qu'il devienne un
instrument d'orchestre dans un vaste local : M. Roller a tâché d'arriver à
cette solution par deux moyens ; 1° dans le piano à queue à table renversée
(trois cordes) il fait attaquer les marteaux en dessus du sillet.
Il place
ensuite, le plus près possible du plan des cordes, le pivot au centre du
marteau, afin de rapprocher, autant que possible, de la perpendiculaire à la
corde la direction du dernier élément de l'arc décrit par le marteau; ce qui
permet d'utiliser une partie d'autant plus grande de la force d'impulsion
transmise par le mécanisme.
Le second moyen par lequel M. Roller croit
arriver à résoudre le problème, c'est son piano à double queue (à trois
cordes sur l'une et l'autre table).
Au moyen d'une pédale, on peut, en
jouant, isoler à volonté l'un et l'autre système de marteaux, en conservant
au clavier la facilité ordinaire, et ajoutant aux ressources de l'exécutant
pour nuancer ses effets.
On conçoit aisément que le tirage des cordes
supérieures et inférieures, établi sur les deux tables entièrement
symétriques, donne évidemment une garantie pour la solidité de l'accord.
Ces
deux pianos, que nous avons examinés avec une scrupuleuse attention dans les
ateliers de ce facteur, et qui n'ont pu être exposés faute d'espace,
ajouteront, nous n'en doutons nullement, à la réputation de leur auteur.
Nous ne nous occuperons pas des pianos droits à 6 octaves, ni de celui à 6
octaves et demie, parce que c'est le même système-perfectionna il est vrai,
que celui qui a obtenu la médaille d'or.
M. Roller a d'autres titres à faire
valoir ; nous arrivons à son application de l'invention de M. Le Père, membre
de Institut d'Egypte; ce savant architecte auquel Paris doit la colonne de
la place Vendôme.
Les recherches de M. Roller au sujet de cette invention
sont innombrables. On peut s'en faire une idée, en éliminant le régulateur
oculaire de raccord, tel que M. Le Père le soumit à ce facteur. Il est des
choses qui, pour être utilement employées, ne peuvent être imparfaitement
exécutées.
M. Le Père, frappé depuis fort long-temps du grand inconvénient qu'offrait
le panu dans la difficulté de maintenir et d'établir l'accord, chercha à le
faire disparaître. Étant parvenu à résoudre son problème par un certain
mécanisme, il s'adressa à M. Roller pour le perfectionner et l'appliquer aux
pianos.
Avec le piano muni du régulateur, on n'a plus besoin d'accordeur,
quand même on serait sourd. Par l'emploi d'un moyen matériel, indépendant de
la perception des sons, chacun peut accorder son piano; ce moyen consiste en
un in dicateur sensible à l'œil, pour le règlement duquel la vue remplace
l'ouïe.
MM. Le Père et Roller assujettissent les cordes métalliques à l'action d'un
ressort, et, au moyen d'un indicateur adapté à ce ressort, on peut se
rendre compte-du degré de tension ou de détension de ces cordes. on sait que
le désaccord d'une corde est produit par l'effet de la rétractation ou de la
dilatation du corps qui la compose, ou souvent encore par l'action
météorologique sur les pointes d'attache de ces cordes.
Par emploi d'un
ressort, de forme circulaire dans le haut, et plus ou moins allongé dans le
bas, lequel porte un indicateur qui montse l'action quelque minime qu'elle
soit de la corde sur ce ressort, MM. Le Père et Roller sont parvenus à
déterminer à la vue la perte de l'accord métallique, cette perte étant même
insensible à l'oreille la plus exercée.
Quand le piano est parfaitement
d'accord, on règle tous les indicateurs au moyen -d'une petite vis; cet
indicateur étant tenu aux deux bras du ressort, en sentira toutes les
variations si la corde se détend ; il en sera de même dans le ressort, alors
l'indicateur descendra ; si, au contraire, il y a surcroît de tension,
l'indicateur remontra.
Alors, au moyen de la vis de tension à laquelle est
attaché un bras du ressort, -et qui se trouve fixé au sommier, on tend ou
détend le ressort, jusqu'à ce que l'indicateur soit ramené au point fixe de
l'accord.
Ainsi, en ouvrant son piano, l'amateur, sans frapper les touches,
n'aura qu'à ramener, au mojen de la vis du sommier, les indicateurs divers
qui auraient changé de place dans leurs position primitive, et l'instrument
sera d'accord.
L'application de ce régulateur aux pianos n'augmentera la
dépense que d'environ 200 fr., qui seront bien compensés par les frais et
l'ennui causés par les accordeurs. Une des choses les plus remarquables de
cette invention c'est le petit espace occupé par ces divers ressorts dans le
piano à deux cordes exposé; car il s'agissait de résister à une force
d'environ 12,000 livres.
Beaucoup de personnes ont demandé s'il n'était
point, à craindre que le ressort ne faiblit par une tension prolongée ; M.
Le Père a chez lui un ressort qui, depuis nombreuses années, supporte un
poids double de celui voulu par la corde, et qui n'a éprouvé aucune
variation perceptible dans sa force. M. Roller, pour éviter dans les pianos
à trois cordes un trop grand nombre de ressorts divers, est parvenu à
adapter les trois cordes de la note au bras d'un seul ressort.
Il s'est
convaincu, par des épreuves souvent réitérées, que des cordes parfaitement
homogènes éprouvaient toujours les mêmes perturbations.
Si une corde se
casse, on la rattache, on la tend ensuite convenablement avec les chevilles
anciennes qu'il a conservées, et on finit par rétablir l'unisson parfait au
moyen d'une petite vis de rappel dont chaque corde se trouve munie et qui
est fixée sur la petite pièce mobile destinée à réunir les trois cordes pour
les joindre par un crochet au bras du ressort.
A cette invention M. Roller a joint un nouveau perfectionnement dans la
construction de ses pianos, qui consiste à remplacer les chevilles
ordinairement employées dans les pianos, par des vis de tirage dont
l'extrémité tient aux ressorts; ces vis avancent et reculent sans tourner
sur elles-mêmes.
Ce facteur a supprimé également l'emploi des pointes en
cuivre fixées sur l'ancien sillet en bois et qui ont été employées jusqu'à
présent pour déterminer la partie vibrante de la corde.
Ce procédé ancien
produisait un frottement excessif sur les cordes, qui les faisait souvent
casser en cet endroit, et la cheville n'agissait d'une manière immédiate que
sur une partie de la corde qui ne doit pas vibrer, tandis que son action
n'est que successive, fort lente et incomplète sur la partie vibrante ; M.
Roller a remplacé le sillet ordinaire par un sillet mobile en métal, qui se
meut dans une petite rainure.
Ce sillet est percé d'un trou pour chaque corde qui y est fixée au moyen
d'une vis, de sorte qu'en tendant ou détendant la corde, le sillet fait un
mouvement de rotation qui emmène la corde, laquelle alors se tend ou se
détend sans aucun frottement.
Le piano, grâce à l'invention de M. Le Père,
et aux perfectionnemens successifs de M. Roller, semble avoir atteint une
perfection à laquelle il était difficile de croire qu'il pût jamais
atteindre.
Un des plus beaux résultats de MM. Roller et Blanchet, et que le
gouvernement n'a pas peut-être assez apprécié, c'est que ces facteurs sont
parvenus, sans rien demander à des mains étrangères, allemandes ou anglaises,
à produire des instrumens qui rivalisent depuis dix ans avec ce que les
Broadwood et les Stodart ont fait de mieux; et que les frontières se
trouvent pour ainsi dire fermées aux pianos de Vienne et des bords du Rhin,
si attrayans sous le rapport du bon marché.
L'atelier de Roller a fourni de
nombreux facteurs ; MM. Boutron, Guerber, Moniot, Thomas, Souffletto,
Mercier, Gibaut, Bernard, Mermes [Mermet], etc., etc., sont de jeunes facteurs, tous
Français qui ont fait chez lui leur apprentissage ; plusieurs d'entre eux
figuraient avec distinction à l'exposition.
Cette maison est une des quatre premières de Paris pour l'importance
numérique; mais une erreur dont nous sommes amenés à parler, c'est de
mesurer l'importance d'une maison au nombre des ouvriers qu'elle occupe.
Il
est évident que celui qui crée ne peut produire autant que celui qui se
borne à exploiter les procédés connus ou copier des produits étrangers ;
c'est aussi un mérite, nous l'avouons, mais tout le monde pensera avec nous
que le premier est supérieur à l'autre de la hauteur du talent au génie.
Le roi, dans sa dernière visite, a écouté avec une grande attention
l'explication du régulateur, et a fait compliment aux auteurs sur la
simplicité du mécanisme et sur son excessive précision. Justice a été rendue
à M. Roller à l'exposition dernière ; en 1839, ce facteur a mieux fait
encore; il y a chez lui progrès."
Lucas Al.
Panorama de l'industrie française publié par une société d'artistes
et d'industriels sous la direction de M. Al. Lucas, 1839, p.
97 (gallica.bnf.fr)
La guitare, par exemple, a moins de son que le violon, bien que
ses tables aient plus d'étendue. Nous entrerons plus tard dans le
développement de cette curieuse théorie qui paraît avoir été perdue pour
tous les facteurs, depuis les Amati, les Stradivarius, les Guarnerius, et
les Steiner, et qui vient heureusement d'être retrouvée par M. Sax.
On conçoit tout le parti que peut tirer un artiste d'une
obéissance aussi entière; rien ne peut l'entraver dans le cours de ses
inspirations; Louis Adam, le Nestor des pianistes de France, disait du piano
de Roller et Blanchet : Quand je suis assis devant un instrument de ce
genre, je m'identifie tellement avec lui que j'oublie qu'il y a un
intermédiaire entre la musique et moi.
Si Mozart avait eu un piano de ces messieurs, il aurait fait quelque
chose de mieux que Don Juan et la Flûte enchantée.
C'est comme si l'on disait que Rubens eût fait de plus belles choses, s'il
eût eu des pinceaux d'Alphonse Giroux.
Expériences de Lepère sur le piano.
Le nom de Lepère, que la campagne d'Égypte et la colonne de la grande armée
doivent transmettre à la postérité, laissera aussi des traces précieuses de
son passage dans le champ de la musique. S'il est tant d'hommes qui ne
peuvent toucher à quelque chose sans y causer des avaries, il en est
heureusement quelques-uns qui, comme Lepère, améliorent tout ce qu'ils
touchent.
Par exemple,
quand nous avons importé, en 1816, la lithographie en Belgique, jamais nous
n'eussions réussi à créer un établissement durable sans avoir appris par
nous-même à nous passer de tout secours étrangers, tant sous le rapport
chimique que pour la partie mécanique, artistique et matérielle.
Nous sommes tenté de
croire que les monopoleurs de l'instruction publique n'ont eu d'autre but,
en divisant et en subdivisant à l'infini l'arbre de science, que de faire du
bois dont on fabrique des chaires et des fauteuils pour tous ses amis et
connaissances.
C'est assez
d'une langue pour l'étude de ma vie, et il a raison jusqu'à un certain point
de purisme inutile; mais le cardinal Mezzofanti en connaît SO, et notre
frère puîné en professe 14. Or, il en est des sciences comme des langues et
de la richesse : plus on en a, plus il est aisé d'en acquérir.
Ayant été
discordés à dessein, nous avons vu une dame et une jeune demoiselle remettre
les aiguilles sur leurs points de repère, et l'accord redevenir parfait :
Ainsi le piano discord, ou plutôt le piano faux (On
confond généralement dans le monde les mots discord et faux. Le piano faux
est celui qui présente des tons impraticables, des tons mal coordonnés : la
difficulté est évidemment de s'arranger pour que les demi-tons ne soient ni
diatoniques, ni chromatiques; ils doivent être égaux avant tout; mais aussi
moyens entre ces deux espèces.
Il est impossible, sans cette condition, que
la touche noire puisse, dans tous les tons, servir simultanément de dièse
pour la touche blanche qui la précède, et de bémol pour la touche qui la
suit en parcourant le clavier du grave à l'aigu.), qui est le choléra des
musiciens et des amateurs, finira par disparaître de nos concerts, comme la
lèpre est disparue de nos hôpitaux.
« Ah! oui, je comprends, reprend le neveu de Dusseck; c'est comme
le sansonnet auquel on crève les yeux pour qu'il chante mieux. »
Ces mots,
prononcés avec l'accent allemand de Neukom, ont couru tous les salons de
Paris; mais personne n'a voulu essayer de la recette de Montal.
Thalberg ne crut pouvoir se
libérer qu'en jouant alternativement sur les deux instruments que ses deux
amphitryons avaient fait apporter, et qu'en répétant les mêmes morceaux sur
chacun d'eux. Le bon Thalberg croyait ainsi ne pas faire de jaloux; mais, au
lieu d'un il en fit deux.
Malheur à qui caresse avec un soin égal,
PARIS -
"PIANOS.
— MM. ROLLER ET BLANCHET.
« L'on peut avoir de plusieurs sortes de chordes
qui soient esgales en longueur et grosseur, comme celles des
monochordes; ou inesgales en longueur et esgales en grosseur; ou inesgales
en longueur et grosseur, comme celles des harpes et de l'épinette; ou
esgaleses longueur et inesgales en grosseur, comme celles des violes et du
luth. Or de quelque manière qu'elles soient différentes, l'homme Soukd les
peut mettre à tel accord qu'il voudra pourveu qu'il sçache leurs différences
tant en matière qu'en longueur et grosseur. »
Le passage que nous venons de
transcrire se trouve dans l'Harmonie universelle de Mersenne, publiée en
1030.
« à savoir combien la terre contient de grains
de sable, supposé qu'elle en soit composée, et si l'homme est plus grand au
regard de la terre qu'un ciron au regard de l'homme. »
C'est vraiment curieux de le
voir accumulant les chiffres pour démontrer combien, il faut d'hommes, dont
chacun soit de trois pieds cubes, pour faire la grosseur de la (erre, après
quoi il démontre que la proportion de la terre à un homme est 58,587,771,053
fois plus grande que celle d'un homme à un ciron ; d'où (ajoutct-ilj chacun
peut conclure quelle estime l'on doit faire de l'homme.
Ainsi il nous apprend quelle
doit être la constitution du ciel ou l'horoscope d'un parfait musicien; il
traite de la proportion du corps du plus excellent musicien qui puisse être;
il examine si le tempérament du parfait musicien doit être sanguin,
phlegmatique, bilieux, ou mélancolique, pour être capable de chanter ou de
composer les plus beaux airs qui soient possibles; et il s'étend sur une
foule de propositions semblables qu'il se plail à développer minutieusement.
Mais à côté de questions
oiseuses, niaises et absurdes, il y a des choses excellentes et du plus haut
intérêt; et trop souvent l'on a taxé d'extravagance ou de chimère des idées
qui se sont réalisées plus tard ou qui pourront se réaliser un jour.
C'est ainsi que Mersenne
entrevit la possibilité de faire accorder des instruments par un sourd ; et,
bien qu'il ne parvint pas à une solution satisfaisante du problème, les
idées qu'il énonça à ce sujet méritent d'être rappelées à l'occasion de
l'instrument qui va nous occuper aujourd'hui.
« Cette proposition, dit l'auteur, a besoin de
quelques suppositions dont la vérité dépend de l'expérience et de la raison
; car il faut sçavoir quelle raison il y a des différons racourcissemens des
chordes aux sons différons quant au grave et à l'aigu, c'est-à-dire qu'il
faut cognoislrc combien il faut tourner la cheville pour faire monter la
chorde au second, trois, et quatrième ton, supposé que l'on sçache combien
il la faut tourner pour la mettre au premier ou au second; et si, par
exemple, une force la fait racourcir d'un doigt, combien 2, 5, ou 4 forces,
etc., la feront lacourcir.
Ceci estant posé, l'on peut marquer les chordes
avec de pe lits points à chaque lieu, afin que les points respondentà
certains lieux de l'instrument, qui feront voir quand les chordes seront
d'accord ; mais une seule marque imprimée sur la chorde suffit pour
cognoistre de combien de tons elle monte ou descend, pourvu que l'on puisse
mesurer son racourcissement ou son alongement par le moyen de cette marque
ou des tours de la cheville; ce que l'on fera aysement si l'on compare la
marque de la chorde avec quel qu'autre marque de la table de l'instrument,
qui fera cognoistre combien la chorde s'alonge ou se doit alonger à chaque
ton ou demie-ton. »
Voilà le procédé imaginé parle
père Mersenne.
Malheureusement l'auteur est
forcé de reconnaître lui-même que ce procédé manquera souvent d'exactitude,
parce que les chordes s'alongent de plus en plus avec le temps, encore qu'on
ne leur donne point de nouvelle tension, et que les extensions ne sont pas
toujours esgales, encore que l'on y ajouste des forces esgales; ce qu'il
développe par des exemples que nous n'avons pas besoin de reproduire.
Il suffira ici de savoir qu'il
signale cet inconvénient sans indiquer la manière d'y remédier.
Cependant aujourd'hui
l'instrument existe, l'impossible est un fait accompli.
M. Lepère, architecte, ancien
membre de l'Institut d'Egypte, à qui l'on doit l'érection de la colonne de
la place Vendôme, et tant d'autres beaux monuments, travaillait depuis
quinze années a la solution de ce problème, dont il ne se cachait pas les
immenses difficultés.
Il se livra d'abord à des
expériences sur la tension des cordes. Cette tension bien calculée suivant
le poids que chaque corde exige pour arriver à un ton voulu, il lui restait
à trouver des ressorts dont la force de traction fût égale au poids attaché
à chaque corde.
C'est là que commençait la
difficulté qui s'augmentait encore par la nécessité de trouver un moyen pour
opérer la tension de la corde en faisant agir les ressorts, car les
chevilles ordinaires ne pouvant entrer dans cette combinaison, il fallait un
système différent.
Il a conservé les divers modèles
qu'il construisit successivement et qu'il abandonna pour d'autres procédés;
nous les avons vus chez lui, et tout le monde peut les voir, car il les
montre avec celle affable prévenance d'un artiste qui, à tant de mérites,
réunit celui de la modestie.
En examinant ces modèles, nous
n'avons pu nous empêcher d'exprimer le désir qu'ils fussent déposés dans
quelque cabinet de physique, ou dans la vaste collection des arts et
métiers, pour y être conservés comme des objets vraiment curieux, et en même
temps utiles; car les essais d'un homme de génie, même ceux qu'il rejette
par suite de découvertes meilleures, ne laissent pas que d'être fort
instructifs.
Apres avoir exécuté un modèle
sur ce principe, il s'agissait de faire construire un instrument en grand ;
il fallait pour cela des facteurs consciencieux, deshommes de talent; M.
Lepère s'adressa à MM. Roller et Blanchet.
Les curieux n'ont cessé
d'affluer devant l'enceinte occupée par MM. Roller et Blanchet, pour voir ce
nouveau piano à régulateur, pour en examiner les détails et pour se
convaincre de la réalité d'une découverte dont l'annonce les avait trouvés
incrédules.
M. Blanchet ne pouvait qu'à
peine répondre à toutes les questions qui lui étaient adressées à ce sujet.
N'oublions pas de dire que le roi el la famille royale se sont long-temps
arrêtés devant cet instrument, quTa particulièrement fixe leurs regards.
Quant au mécanisme inventé par
M. Lepère, il est moins compliqué que l'on serait tenté de le croire. V.n
voici la description telle que MM. Roller et Blanchet l'ont donnée
eux-mêmes. Il se compose.
Si en serrant l'écrou on agit
sur le ressort, ses deux branches s'écartent, et l'extrémité supérieure de
l'aiguille est entraînée du côté delà branche où le bras de levier esl placé
le plus haut.
Si, au contraire, on desserre
l'écrou, les deux branches se rapprochent, et le mouvement de l'aiguille a
lieu dans le sens contraire. L'extrémité de cette aiguille qui décrit une
portion de cercle en suivant la forme arrondie du ressort, porte une petite
pièce en bois.
Sur cette pièce comme sur le
secteur ajusté sur le ressort, esl tracée une ligne. Ce sont ces lignes qui
servent de repère : en d'autres termes, l'accord de la corde se règle sur
leur coïncidence.
Lorsqu'on remet une corde, par
exemple, si elle n'est pas en tous points semblable à celle qui a cassé, la
tension qu'il faut lui donner pour la faire arriver au ton n'est plus la
même, les branches du ressort se trouvent trop ou trop peu écartées, et
l'aiguille dans une autre position.
Dans ce cas (après s'être bien
assuré que la corde nouvelle est au ton juste), on desserre la vis du
secteur, et on le place de manière que la petite ligne qui est tracée dessus
se trouve en face de celle de l'aiguille.
Cette objection qui subsiste, il
esl vrai, pour les petites fortunes, ne repoussera pas les amateurs riches,
qui ne paieront pas trop cher de quelques centaines de francs l'agrément de
pouvoir se passer d'accordeur.
C'est surtout à la campagne
qu'on appréciera la grande utilité de cette découverte, grâce à laquelle on
ne se trouvera plus dans la fâcheuse alternative de jouer sur un instrument
faux ou de s'en priver complètement, faute d'un homme capable de le mettre
d'accord ; car le premier venu, fût-ce même un sourd, pourra se charger de
cette besogne.
Quelques perfectionnements dans
la mécanique sont venus ajouter au mérite de ces instruments qui ont depuis
long-temps obtenu la faveur du public.
Vornehmlich aber haben sie die Erfindung von Le Pere vervollkommnet
angewendet, und Piano's verfertigt, die man ohne Beihülfe des Ohrs stimmen
kann.
Hierüber enthalten bereits die Mém. de l'Instltut vom April 1837
Verhandlungen. Das Wesentliche beruht in Folgendem: Jede Saite wird in der
Nähe der Stifte getheilt und mit beiden Theilen an die beiden Arme einer
hufeisenförmigen Stahlfeder befestigt, die sonach beide Theile der Saite
verbindet und durch Spannung der Saite mitgespannt wird.
An dem einen Arm
der Feder ist ein Zeiger angebracht, der sich in einem Winkel aufwärts bis
in die Mitte des Bugs der Feder verlängert und, wenn die Saite, und mit ihr
die Feder, die dem verlangten Tone angemessene Spannung hat, gerade eine
dort angebrachte Linie deckt.
Jede Abweichung des Zeigers von dieser Linie
zeigt entweder eine stärkere oder schwächere Spannung, folglich eine
Verstimmung, und die erste Stimmung der Saite wird, ohne daß man nöthig hat,
den Ton anzuschlagen, wiederhergestellt, wenn man die Spannung der Saite so
verändert, daß der Zeiger wieder die Linie auf der Feder deckt. Man sieht
leicht ein, daß alles darauf beruht, daß Feder und Saite, wenn sie einmal
auf einen gewissen Grad der Spannung gebracht und darauf gehalten sind,
nicht nachgeben.
Dazu gehört aber, daß man für jede Spannung oder für jeden
Ton die angemessene Starke der Saite und der Feder durch die Erfahrung
kennen lerne, und daß sowohl die Federn als die Saiten vor dem Gebrauch in
die ihnen zukommende Spannung gebracht und darin, bis sie nicht weiter
nachgeben,-gehalten werden : damit man bei der Feder genau die Stellung des
Zeigers anzugeben wisse und die Saiten nicht so oft nachzustimmen brauche.
Die Erfinder erbieten sich zu dem Ende bereits geprobte Saiten zu liefern,
welche die erforderliche Spannung sogleich dauernd ertragen. Hierdurch
glauben sie einigen Einwendungen zu begegnen, welche gegen diese allerdings
höchst sinnreiche Erfindung gemacht worden."
Die Industrieausstellung zu Paris im Jahre 1839: Mit
Angabe der Producte und ..., 1839, p. 256-257
Ces
instruments, appelés pianos droits, ont, en tous points, justifié le succès
que les principaux journaux leur avaient prédit à cette époque.
On les a
imités partout depuis une médaille d'or décernée, en 1834, à M. Roller pour
cette oeuvre remarquable.
C'est avec
plaisir que nous les avons retrouvés, cette année, avec un nouveau
perfectionnement.
En
abaissant l'extrémité de la touche dans laquelle fonctionne l'échappement de
MM. Roller et Blanchet fils sont arrivés à rendre insensibles sous les
doigts les divers frottements qui nuisent tant, dans un grand nombre de
pianos, à l'expression des inspirations de l exécutant.
Dans ce
nouvel essai, on retrouve toujours l'idée première de M, ROLLER : celle
d'augmenter la puissance du son en reduisant le plus possible les dimensions
du meuble."
La France Industrielle, 11/07/1839, p. 1
PARIS -
"Nous essayerons pas de citer
ici les noms de tous les honorables industriels dont il a tour à tour admiré
les produits.
Arrivé notamment devant les
pianos de MM. Roller et Blanchet, il est entré dans leur enceinte et s'est
fait expliquer le système du nouveau régulateur de l'accord, qui consiste à
metre un sourd à même de maintenir de l'accord, découverte précieuse due à
l'un de nos plus habiles architectes, M. Lepère, et que M. Roller a su
perfectionner et appliquer à ses pianos." La France Industrielle,
23/05/1839, p. i
PARIS -
"Messrs.
Roller and Blancbet exhibited a curious instrument of this kind, so
constructed, taht the tuning was effected by the eye, not by the ear."
Niles' National Register: Containing Political,
Historical, Geographical ..., 1840, p. 89
Ces instruments, par leur construction soignée
et par la beauté des sons qu'ils émettent, prouvent que l'établissement où
ils ont été confectionnés maintient la réputation qu'il s'est acquise depuis
plus de vingt ans.
En 1823, cette maison obtenait déjà la médaille d'argent
pour ses pianos carrés, et c'est en 1827 que M. Roller créait le piano droit,
dont l'usage est devenu général. Par cette invention, il a contribué d'une
manière remarquable au développement de l'industrie des pianos et à
l'extension du goût de la musique.
Depuis lors, MM. Roller et Blanchet ont
fait de constants efforts pour apporter des perfectionnements dans la
facture. Leur établissement est toujours digne de la médaille d'or qu'il a
méritée aux expositions précédentes."
Rapport
du Jury central, Paris Jury central, Imprimerie de Fain et
Thunot, 1844
table de harmonie en hêtre
Cette condition ne parait pas aussi absolue pour les pianos, car MM Roller et Blanchet exposaient un piano droit dont la table est en hêtre, et qui a une intensité de son remarquable. Ce résultat n'est cependant pas nouveau; car M. Pape, après avoir essayé le cèdre, qui a plus d'analogie avec le sapin, a fait des pianos dont les tables étaient en érable, et qui lui ont donné de bons résultats.
En 1834, M. Pleyel avait imaginé de plaquer les tables de sapin avec
de l'érable ou de l'acajou, idée beaucoup moins heureuse que celle
de n'employer qu'une seule espèce de bois. Les expériences de feu Savart ont démontré que, dans ce dernier instrument, où les cordes sont ébranlées parallèlement à la table, celle-ci n'entre d'abord en vibration que paralèllement à son plan, aidée en cela par l'alternation des fibres molles et dures du sapin; les fibres molles se compriment et se dilatent alternativement pour permettre le mouvement latéral des fibres dures, et amènent enfin les vibrations normales au plan de la table, parce que, gonflées pendant leur compression dans la direction normale, puis déprimées pendant leur dilatation, elles réagissent tant sur l'âme qui détermine les vibrations normales du fond que sur le chevalet, qui, concurremment avec l'âme, détermine enfin les vibrations normales de la table. [...] Revue scientifique et industrielle, Volume 17, 1844, p. 377
piano transpositeur PARIS - "L'idée d'un piano transpositeur n'est pas nouvelle; elle avait déjà été tentée autrefois, mais sans beaucoup de succès. Plus récemment, MM. Roller et Blanchet l'ont renouvelée en faisant marcher le clavier, ce qui présente le grave inconvénient de faire frapper les marteaux sur des cordes différentes, et par conséquent d'accélérer leur destruction, en même temps que la pureté du son s'en trouve altérée. Les points de contact entre les cordes et les marteaux ne restant pas les mêmes, certains points de ceux-ci se durcissent plus que les autres, et on ne peut obtenir que des sons sans rondeur et sans franchise, quand de nouvelles cordes sont attaquées par des portions de duretés différentes." Revue scientifique et industrielle, Volume 17, 1844, p. 401
pianos droits à cordes obliques PARIS - "La maison Roller et Blanchet, dans la spécialité du piano droit, nous semble offrir, comme celle d'Erard, cette pondération si désirable et si rare des qualités diverses qui doivent présider à la confection d'un bon piano. M. Roller a créé et mis au monde, si je ne me trompe, cette nouvelle famille de pianos connus sous le nom de pianos droits à cordes obliques. Depuis les premiers travaux de M. Roller, de nombreux facteurs ont adopté cette forme. L'on a développé la sonorité en étendant la longueur des cordes au moyen d'une augmentation dans la dimension du sommier et la hauteur de la caisse, et aussi de la position demi-oblique ou verticale de la corde; mais les avantages de cette modification sont balancés par l'inconvénient de masquer le pianiste assis et en partie même le chanteur placé debout derrière l'instrument. D'ailleurs, dans le format élégant adopté par la maison Roller et Blanchet, elle continue à produire des pianos remarquables par la bonne entente du travail, la douceur du clavier, la précision du mécanisme, l'égalité et la beauté des sons. Elle justifie la réputation européenne dont elle jouit depuis plus de quinze ans." Archives du Commerce ..., Volume 36, 1845, p. 389
ROLLER, chevalier de la Légion-d'Honneur PARIS - "A la suite de l'exposition, M. Roller, fabricant de pianos, vient d'être nommé chevalier de la Légion-d'Honneur. Cette honorable distinction était bien due à l'inventeur du piano droit, dont l'ingénieuse création a si heureusement influé sur la direction de l'Industrie des pianos. En rendant cet instrument aussi commode que puissant, il en a consacré l'usage. M. Roller, déjà tant encouragé par l'opinion publique, en a reçu la preuve par le grand nombre d'imitateurs de ses pianos droits. Il vient de s'adjoindre, comme associé, M. Blanchet ancien élève de l'Ecole polytechnique, dont la collaboration doit encore, s'il est possible, augmenter la confiance qu'inspirent ses talens." La France musicale : paraissant le dimanche sous le patronage des célébrités musicales de la France et de l'étranger, 07/01/1844, p. 255-256 (gallica.bnf.fr)
PARIS - "Nous avons dit précédemment qu'on a tenté plusieurs fois déjà par des moyens mécaniques de contre-balancer l'influence atmosphérique sur les cordes du piano, et, par là, de remédier à la variabilité de l'accord. Il y a une dizaine d'années environ, M. Lepère, architecte d'un mérite éminent, amateur passionné de musique, et en même temps physicien et mécanicien, frappé du peu de stabilité de l'accord dans le piano, qui peut, on le sait, être faux quelques heures après le travail de l'accordeur, avait imaginé un mécanisme des plus simples et des plus ingénieux par lequel chacun pouvait rétablir l'accord le plus parfait sans le secours de l'oreille, si le piano avait été d'abord accordé convenablement une première fois. Perfectionné par M. Roller, cet appareil était du plus grand avantage, puisque le maintien de l'accord dans l'instrument se trouvait ramené à une opération si simple qu'elle était exactement analogue à celle de mettre sa montre à l'heure. Il est vrai de dire que le son prenait une qualité un peu métallique, ce qui était un inconvénient; mais nous pensons qu'il n'était pas impossible à un facteur aussi habile que M. Roller de faire disparaître ce défaut. Nous ignorons pourquoi une invention qui aurait pu être si utile aux artistes, et surtout aux amateurs qui habitent loin des villes, où un accordeur ne se trouve pas toujours à leur disposition, est tombée dans l'oubli et n'a pas eu de suite." La Tribune des artistes : journal publié sous les auspices de la Société libre des ..., 1849, p. 140-141 (gallica.bnf.fr)
PARIS - "Die Herrn Roller & Blanchet unter die ältesten und ersten Firmen in ihrem Fache gehörend, hatten 3 aufrechtstehende, reich verzierte Pianos ausgestellt, welche dem Rufe vollkommen entsprachen, welchen sich die Exponenten mit dieser, wenn ich nicht irre von ihnen zuerst iu Paris verfertigten Gattung Pianoforte erworben haben. Es bedürfte als Beleg dessen kaum mehr der Erwähnung der kleinen Medaillensammlung, deren sich die Erponenten erfreuen. Sie besißen nämlich schon 2 silberne und 4 goldene Medaillen, aus dem Jahre 1823, 1827, 1834, 1839 und 1844; darunter natürlich 1 silberne und 3 goldene von Papier als rappel de médaille, welche Einrichtung wie auch bei uns, wahrscheinlich weil sie französisch war, aber glücklicher Weise nur einmal nachahmten. Die Franzosen mögen es mir verzeihen, wenn ich bei dieser Gelegenheit nicht genug meine Verwunderung ausdrücken kann, wie man durch eine so lange Reihe von Jahren eine so lächerliche Bestimmung ausrecht erhalten konnte. – Schriftlich Jemanden bezeugen, daß er ein Auszeichnungszeichen wieder verdient habe, und es ihm nicht wirklich geben, bleibt immer eine Inconsequenz; diese aber noch durch den Sap vertheidigen wollen: Daß ja die Hinweisung auf früher Empfangenes, dieses Empfangen vollkommen ersepte, erfüllt mich wirklich mit Bangen, denn wie leicht könnte nicht in Folge dieses sehr gefährlichen Arguments, einer meiner Åbnehner auf den malitiösen Gedanken gerathen, bei Ankauf eines zweiten Clavieres seine Sculd damit abtragen zu wollen, daß er mir bezeugte: Jd hätte den bereits für das erste Clavier erhaltenen Preis, an dem Zweiten, wieder verdient!" Verhandlungen des niederösterreichischen Gewerb-Vereins, 1849, J. B. Streicher, p. 350
LONDRES - "ROLLER & BLANCHET, 26 Rue Hauteville, Paris-Manufacturers. Four different pianofortes of different descriptions." Official descriptive and illustrated catalogue of the Great exhibition of the works of industry of all nations, 1851
LONDRES - "Rimpetto ad Erard, i signori Roller e Bianchet hanno situato quattro piano-forti più o meno grandi, ma di forma più che gentile. Ve n' ha fra questi uno bellissimo in una cassa di rovere di recente intagliala: il pedale è sostenuto da due cariatidi allegoriche, intagliate a perfezione. Questi quattro pianoforti hanno l'impronta della semplicità che risponde alla giusta confidenza che i signori Roller e Blanchet hanno nella bontà della loro fabbrica : è la modestia della forza." L'Italia musicale, Volume 3, 1851, p. 172
LONDRES - "Unter den aufrecht stehenden Piano's verdienen die von Roller und Blanchet vor allen übrigen den Vorzug. Roller war bekanntlich der Erfinder der aufrecht stehenden Piano's mit schief gelegten Saiten. Die Piccolo"s dieser Firma sind bei ihrer außerordentlichen Kompaktheit und Eleganz von unübertroffen schönem Ton. Die Spielart ist leicht, gut repetirend bei höchst einfachem Mechanismus. Die tiefsten Saiten sind mit Kupferdraht übersponnen, die mittlern des Basses mit Eisendraht. Die Kommission erkannte diesen Instrumenten mit vollem Recht die Preismedaille zu." Amtlicher Bericht Über Die Industrie-Austellung Aller Völker Zu London Im ..., 1852, p. 871
PARIS - "La maison connue généralement sous la raison Roller et Blanchet est, depuis de longues années, au premier rang de l'industrie musicale. Son origine remonte plus haut que la création du piano; car Blanchet (François-Etienne), habile facteur de clavecins, qui vivait en 1750, en est le fondateur.Ses successeurs immédiats furent ses fils et petit-fils; ce dernier (Armand-François-Nicolas), très-distingué dans sa profession, fut attaché à la maison de l'Empereur, et, plus tard, au Conservatoire de musique. Il mourut en 1818, laissant un fils en position d'occuper dignement ses différents emplois (1). Blanchet (Nicolas) suivit la carrière de ses pères; il ouvrit laborieusement une nouvelle voie à la fabrication du piano, dont l'usage avait, dès cette époque, prévalu sur celui du clavecin. Nicolas Blanchet était facteur breveté par Mme la duchesse de Berri, lorsqu'en 1826 il s'associa Roller, son émule, et leur établissement prit la dénomination sociale Roller et Blanchet. Roller et Blanchet créèrent le piano droit, et prirent un brevet (en 1827) pour s'assurer la libre et unique exploitation de ce nouveau genre de piano. Cette interdiction, faite à la facture, de produire des pianos de cette forme, souleva de grandes rumeurs. Chacun de dire que le piano droit n'aurait pas de succès, que cette invention tomberait comme tant d'autres. Les efforts de Roller et Blanchet ne furent cependant pas ralentis. Loin de là, ils perfectionnèrent leur idée première, améliorèrent la forme du piano droit, et firent de nombreux voyages, tant en France qu'à l'étranger, pour le faire adopter. Ce ne fut que plus tard qu'ils laissèrent le champ libre à la concurrence, dans l'espoir de populariser cette ingénieuse innovation. Le succès couronna leur œuvre : ceux qui avaient le plus déprécié le nouvel instrument en furent les plus ardents préconiseurs; tous cherchèrent à le rendre d'un prix accessible aux masses; et, dès lors, le piano ne fut plus un objet de luxe. La culture de l'art musical se répandit au fur et à mesure de l'introduction du piano droit; et, la renommée de Roller et Blanchet grandit avec rapidité, comme il arrive lorsque le succès repose sur un perfectionnement aussi peu contestable. Ils obtinrent la médaille d'argent à l'exposition de l'industrie française de 1827, puis la médaille d'or en 1834, et le rappel de la même récompense en 1839. Enfin, ils furent nommés facteurs de la reine Marie-Amélie en 1840. Quelques années plus tard, Blanchet, se retirant des affaires, céda sa succession à son fils, ancien élève de l'École Polytechnique, qui, à la fin de ses études, avait été nommé officier du génie, et destiné à poursuivre une brillante carrière dans les armes savantes. Sacrifier le charme et la gloire de la vie militaire, abandonner ses affections de camaraderie pour entrer dans la vie industrielle et commerciale, rien ne coûta à Blanchet fils; quand il put craindre que son père laissât entre des mains étrangères une maison qu'il devait considérer comme une fortune patrimoniale. D'ailleurs, il pouvait appliquer à l'industrie les pianos le fruit de ses études scientifiques, et entreprendre ce triple problème, digne de recherches, où l'on doit tour à tour invoquer les règles de la mécanique, les principes de l'acoustique et les considérations artistiques de l'ordre le plus élevé. Rien ne pouvait donc mieux convenir au progrès d'une fabrication, jusqu'alors empirique, que la coopération d'un homme jeune, éclairé, possédant ce sentiment exquis des arts qu'une éducation distinguée peut seule donner. La maison Roller et Blanchet, en devenant Roller et Blanchet fils, acquit une nouvelle source de prospérité, et doubla sa réputation première. En 1844, à la suite des concours de l'exposition nationale, un nouveau rappel de la médaille d'or fut accordé à la fabrication de Roller et Blanchet fils, et, en 1849, ils furent mis hors de concours. Enfin, l'exposition universelle de Londres fut l'occasion d'un nouveau succès: The prize-medal leur fut décernée par le jury international. C'est peu de temps après, en janvier 1852, que Blanchet fils devint seul propriétaire de l'intégralité des objets et valeurs composant la manufacture, par l'acquisition qu'il en fit à son ancien associé, et qu'il fut personnellement désigné pour être facteur de LL. MM. l'Empereur et l'Impératrice. Aujourd'hui, tout en continuant à fabriquer des pianos semblables à ceux qui firent la fortune de ses devanciers, Blanchet fils a créé de nouveaux modèles, réunissant à l'élégance du meuble les qualités essentielles de l'instrument. Il a pu perfectionner encore les plans et calibres de Roller et Blanchet, en faisant concourir à ce but les anciens et fidèles ouvriers de cet établissement, tous initiés depuis de longues années à ses bonnes traditions. Les instruments qu'il a exposés dans le Palais de l'Industrie sont d'un mérite hors ligne. 1. Voir la Biographie universelle des musiciens, par Fétis, t.I, page 213." Histoire illustrée de l'exposition universelle, Charles-Joseph-Nicolas Robin, Furne, 1855, p. 97-100
PARIS - "C'est une curieuse industrie que celle de la fabrication des pianos, industrie considérable d'ailleurs, et dans laquelle la France n'a point de rival. Paris, à en croire les enseignes, compte autant de fabricants que de rues, et pourtant, à peine peut-on citer dans Paris une dizaine de fabricants véritables; les autres sont de faux fabricants, des facteurs qui achètent ça et là, en fabrique et en gros, les différentes pièces dont se compose la machine sonore, assemblent le tout, l'enferment dans une caisse et le donnent pour un instrument de leur fabrication, quelquefois même de leur invention. En réalité, il n'y a de fabricants véritables que MM. Erard, Pleyel, Pape, pour les grands pianos; M. Blanchet, pour les pianos droits, et cinq ou six autres moins importants. Au premier abord, il semble indifférent qu'un piano soit ajusté par un accordeur ou fabriqué de toutes pièces par un facteur. Pourtant la différence est capitale. Le fabricant qui prépare chez lui toutes ses pièces, qui a sous les yeux, pour les exécuter, les meilleurs ouvriers, qui est sûr des matériaux qu'il emploie, qui ne fait ses sommiers et ses tables d'harmonie qu'avec des bois longtemps conservés et abattus en bonne saison, séchés lentement, progressivement, per dant douze ans quelquefois, celui-là seul peut livrer des instruments solides, sonores, faciles à jouer, tenant bien leur accord et conservant leurs qualités durant de longues anénes. C'est ainsi que nous avons entendu des pianos droits de MM. Roller et Blanchet qui, après quinze ans d'usage, n'avaient presque rien perdu de leurs qualités; nous avons vu des tables d'harmonie, qui avaient vibré pendant plus de vingt-cinq ans, et qui n'avaient pas subi la moindre dépression dans leur plan. Mais tous les pianos, par malheur, ne sortent pas des ateliers de M. Blanchet; si cela était, ils seraient moins communs et meilleurs, petit mal et grand bien. Quoi qu'il en soit, les pianos abondent à l'Exposition; mais combien d'exposants qui n'ont eu que la peine de fixer l'instrument dans sa caisse ! Ce n'est pas seulement pour les pianos qu'il y a de faux fabricants; on en trouve dans toutes les branches de l'industrie parisienne. C'est ce qui constitue les marchandises dites, autrefois, « de pacotille ». Dans toutes les loges de concierge, il y a aujourd'hui un piano et une pendule de pacotille. Les objets de pacotille correspondent assez bien aux denrées falsifiées, avec cette différence que les denrées falsifiées détruisent le corps, et que les pianos de pacotille corrompent le goût et faussent les oreilles." Revue contemporaine: philosophie, histoire, sciences, littérature ..., Volume 21, 1855, p. 188-189
PARIS - "Quelle maison.... que disons-nous ? quel étage, quel appartement n'a pas de piano ? Le piano n'est plus un instrument, c'est un ami. Il cause sous la main qui le caresse, il égaie la solitude, il est le confident des seerètes pensées, l'interprète de la grande musique, le complice innocent de tous les plaisirs.
Il accompagne la romance qui pleure ou sourit, il traduit l'opéra
nouveau, il tient lieu d'orcliestre, il est lui-même un orchestre
tout entier, et la symphonie, qui plus tard fera le tour du monde,
chante d'ahord sur son clavier.
L'aristocratique piano à queue étant un grand seigneur, il lui
fallait des salons comme on en voyait jadis dans les fastueux hôtels
du faubourg Saint-Germain. Il y avait là quelque chose à faire, et
ce quelque chose, deux facteurs habiles, MM. Roller et Blancbet, le
firent en 1827, époque où ils prirent un brevet pour leur invention.
Quand l'argent ne manquait pas, la place manquait. La popularité du
piano date du piano droit. La forme inventée, le piano eut ses
grandes lettres de naturalisation. Il entra dans le village, monta
dans la mansarde et partit pour la mer du Sud.
Voir aussi BLANCHET Fils - Expositions dès 1855 ! ROLLER & BLANCHET Cliquer sur les liens ci-dessus.
Pour les références voyez la page
|
||||||||||