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Facteurs de pianos en France
Un siècle de facture de pianos à Nantes
par Jean-Marc STUSSI
Ils ont tous été installés au centre de Nantes entre les places Graslin et
Royale actuelles, à relativement peu de distance les uns des autres. Il n’a
pas été possible de cerner la production effective de ces
facteurs-fabricants de pianos, car les données qui les concernent ne sont
pas aisément accessibles ou n’existent pas. Seules les archives de ces
entreprises pourraient les fournir, comme cela a pu être effectué pour
Erard, Pleyel et Gaveau, fabricants documentés à partir des registres
d’atelier et comptables numérisés.
LETE, LETE-DIDION,
VUILLEMIN-DIDION La ville de Nantes a connu entre 1847 et les années 1940 une succession de trois manufactures de pianos qui se sont relayées par le biais de relations familiales. La première a été celle de Dominique Joseph LÉTÉ, continuée par son neveu par alliance Louis DIDION, lui-même ayant transmis son affaire à son gendre Charles VUILLEMIN. Ces trois personnages-clés de la facture nantaise, ont conduit, chacun à sa manière et selon ses ambitions, ces manufactures de pianos provinciales.
Dominique Joseph LÉTÉ est issu d’une large famille de luthiers, de fabricants d’instruments, de facteurs d’orgues (d’église, de barbarie) et de marchands de musique de Mirecourt. Il est né en cette ville le 8 mars 1804, fils de Joseph LÉTÉ, marchand d’instruments, et Thérèse Laroche.
Il est le cousin de Nicolas Antoine LÉTÉ (1793-1872), facteur d’orgues
d’églises (Mirecourt, Louisiane) puis marchand d’instruments à Paris de la
Maison LÉTÉ-Simon. Celle-ci avait été créée, en 1819, par son père Antoine
LÉTÉ (1766-1819) époux de Marguerite Simon (216 rue Saint-Honoré, puis 20
rue Pavée Saint-Sauveur et enfin 10 rue du Bouloi), et revenu à Mirecourt
pour reprendre la facture d’orgues après 1829 (¹)(²). La généalogie des familles LÉTÉ a été fournie
par (¹). Il n’a alors que 24 ans. Il s’est en effet établi comme luthier à Nantes en 1825. « Sa lutherie est intéressante, mais les bords sont un peu épais. Il est le fondateur de la maison DIDION de Nantes” (¹). Le 28 décembre 1833, il épouse, à Nantes, Rose Elisa Robina, née le 18 juillet 1814 en cette ville, fille de Jean Marie Louis Robina, peintre, et Rosalie Bastard (domiciliés rue des Constructions, 6°Canton) (³).
Á son mariage, LÉTÉ est déclaré « luthier » résidant rue Crébillon.
Parmi les témoins figure Julien Secher (+<1856 Nantes), 27 ans, tailleur,
27a rue de la Fosse, beau-frère de LÉTÉ par son mariage avec Marie Joséphine
Robina, soeur de Rose Elisa et père d’Amélie Joséphine Secher (o8/7/1837
Nantes) qui épousera Louis DIDION, négociant puis facteur de pianos. Le
couple LÉTÉ-Robina n’aura pas d’enfants. On ne sait s’il avait d’autres employés non domiciliés rue Crébillon. De 1856 à 1861, LÉTÉ est « marchand de pianos », avec au moins deux employés facteurs de pianos, à savoir Henry Jules, 22 ans, résidant 15 rue Crébillon et Secher Ernest, 28 ans, facteur de pianos résidant rue Crébillon, son neveu par alliance (mère : Marie Joséphine Secher-Robina), ainsi que DIDION Louis, 28 ans, déclaré « gendre » (profession non spécifiée) mais en réalité neveu par alliance de LÉTÉ, car époux de Secher Amélie, 24 ans, fille du couple Secher-Robina, frère d’Ernest et nièce de Rose Elisa l’épouse de LÉTÉ.
Le couple DIDION-Secher a
une fille Louise, âgée de 3 ans en 1861 qui deviendra l’épouse de Charles
VUILLEMIN (cf. infra). LÉTÉ héberge également sa nièce Amélie Sécher, 19
ans, mais sa profession n’est pas spécifiée (⁴). Facteur de pianos en 1866,
LÉTÉ est secondé par DIDION Louis, accordeur. Il s’agit ici de BRESSLER père dont le fils ouvrira par la suite une manufacture de pianos. Ceci montre que la création de l’atelier de fabrication de pianos de LÉTÉ s’inscrit dans un contexte déjà en partie occupé par d’autres fabricants, et qu’il devait y avoir possibilité d’extension d’ateliers.
BRESSLER Fils ayant tenu ses
ateliers jusque dans le dernier quart du 19° siècle, LÉTÉ, puis DIDION son
successeur, devaient nécessairement être en concurrence avec lui. Il
resterait peu d’instruments de LÉTÉ, du moins d’après ce que l’on peut
déduire du faible nombre de pianos « LÉTÉ » proposé actuellement à la vente.
DIDION Louis À la suite du décès de Dominique LÉTÉ, la manufacture LÉTÉ passe par une période où elle sera dénommée « DIDION Neveu successeur de LÉTÉ », pour devenir ensuite « LÉTÉ-DIDION » probablement autour de 1875. En 1889, à l’Exposition de Paris, « LÉTÉ-DIDION » est classé « Hors concours Expert adjoint au Jury ». Une autre plaque d’adresse non datée, mentionne cependant aussi « Pianos et Orgues DIDION Nantes ». Louis DIDION est dynamique et ambitieux, car il développe son affaire au 15 rue Crébillon où elle restera, par l’intermédiaire de ses successeurs, jusque vers 1940. Ateliers et manufacture ne sont nécessairement à cette adresse. En 1894, la manufacture était située au 2 rue d’Erlon à Nantes.
Etapes de son activité : Louis DIDION est originaire de Charmes (Vosges) où il est né le 30 mai 1832, fils de DIDION Isidore, négociant, et d’Anne Jacquemin née à Epinal en 1805 (décédée le 15 juin 1897 à Chantenay-sur-Loire). Il épouse à Nantes le 11 novembre 1856, Amélie Joséphine Secher, née le 8 juillet 1837 à Nantes, fille de Julien Pierre Marie Secher, tailleur rue Lekain (5° canton), et Marie Joséphine Robina née à Nantes le 27 février 1802 (²)(³).
L’acte de mariage a été dressé par
Charles Secher, 36 ans, employé de mairie, oncle maternel de l’épouse,
domicilié place du Commerce ; parmi les témoins se trouve Charles Louis
Secher, marchand de nouveautés, 35 ans, cousin de l’épouse, demeurant rue de
Feltre. Amélie Secher est décédée à Nantes le 10.12.1924 à l’âge de 87 ans.
Le couple aura deux filles (³) : Contrairement à l’époque de LÉTÉ, aucun autre employé ne réside rue Crébillon, hormis et brièvement, le facteur de pianos STAUB Jacques, venu de Paris après la fermeture de son atelier de facture de pianos « J. STAUB et Cie » avenue de Clichy. Celui-ci n’y restera cependant que très peu de temps, car, dès 1874, il va s’installer à son compte au Mans où il ouvre magasin de musique et atelier (¹⁰). La résidence de Jacques STAUB à la rue Crébillon est attestée par l’acte de naissance de sa fille Marie Eugénie (³).
Outre la vente de sa production d’instruments, DIDION
s’approvisionnait, comme LÉTÉ, chez Erard (12 pianos en 1880-1881 : grands ½
obliques à 1050.-frs, pianos à queue à 2200.-frs) et d’autres fabricants
parisiens, Pleyel, Herz, Gaveau, comme en attestent ses publicités dans
l’Ouest-Eclair de l’époque.
Hors concours, ce facteur exposa des
pianos droits à cordes obliques, établis pour résister aux influences
atmosphériques du voisinage de la mer. La majeure partie des pièces ayant
servi à la fabrication de ces instruments était de provenance parisienne,
lisons-nous dans le rapport de M. Thibouville-Lamy, ce qui veut dire, en
d’autres termes, que ce facteur ne construit pas entièrement ses pianos. Ils
possèdent cependant un caractère de facture spécial, ajoute le susdit
rapporteur.”
VUILLEMIN Charles VUILLEMIN Marie François Louis Charles (prénoms usuels les plus courants: Marie et Charles) est né le 12 juillet 1848 à Nossoncourt (Vosges ; entre Baccarat et Rambervillers), fils de Jean VUILLEMIN, Percepteur des Contributions Directes à Rambervillers (1878 ; 59 ans à cette date), et de Anne Schwartz (54 ans en 1878) (²). Il n’a pu être établi que sa famille est en relation avec les VUILLEMIN luthiers et/ou marchands d’instruments à Mirecourt, ce qui pourrait expliquer des relations avec les LÉTÉ (le patronyme VUILLEMIN est fréquent dans les Vosges). Issu de Polytechnique, il entre dans l’artillerie de marine le 10.8.1866 (il a alors 18 ans !), est sous-lieutenant le 10.8.1870, Lieutenant en second le 10.8.1872, en premier le 11.6.1873, Capitaine en second le 21.7.1875, en premier le 24.2.1877.
Á partir du 1.1.1881, il est en service à Lorient
comme professeur (d’école militaire ?). Á 37 ans, il est capitaine au
régiment d’artillerie à Lorient (1878) ; il devient ensuite Chef d’escadron.
Comme un de ses fils est né à Paris en 1879, il est vraisemblablement déjà
en poste dans la capitale comme le confirme les naissances de ses fils Jean
et Pierre en 1882 et 1887 (3, 4).
Descendance : De cette union naîtront six enfants (3, 4 , 12) :
Eléments de son activité : La carrière de Charles VUILLEMIN qui succèdera à Louis DIDION en 1898 et qui sera à l’origine de la manufacture VUILLEMIN - DIDION, est très étoffée, Charles paraissant disposer de grandes capacités intellectuelles et pratiques (3, 4) :
1878 : Capitaine au régiment d’artillerie de marine à Lorient ; Bien que n’ayant eu aucune formation initiale en facture de pianos, il a apparemment très bien mené, comme gestionnaire avisé, la manufacture qu’il a largement développée. Sa formation à Polytechnique, gage de ses capacités, lui ont certainement permis de comprendre très rapidement les subtilités de la facture de pianos, mais considérant les nombreuses activités administratives qu’il assumait, il devait aussi s’appuyer sur une solide équipe de spécialistes en facture de pianos. Il a déposé plusieurs brevets dont l’un concerne la facture de piano. L. Verbeeck (⁷) signale une adresse 5 rue du Port en 1913 qui pourrait être celle des ateliers de fabrication ; comme il y a plusieurs rues du Port à Nantes et que les usines et ateliers ne sont généralement pas répertoriés, il n’a pu être déterminé à quoi correspond précisément cette adresse. Une adresse de 1925 est signalée au « 19 rue de Rennes à Nantes (Loire-inférieure), fabrique de pianos », sur la sortie nord de Nantes : il semble bien s’agir de l’adresse de la manufacture avant qu’elle ne s’installe à Chantenay (¹³).
La maison VUILLEMIN-DIDION
assurait elle-même la vente de sa production auprès des clients, et
s’appuyait sur la publicité dans le quotidien nantais « Ouest-Eclair » (¹⁴).
Celle-ci nous apprend également que VUILLEMIN-DIDION avait des représentants
à Lorient (Porcherat, 65 rue du Port), de même qu’à Fontenay-le-Comte
(magasin de musique et d’instruments Lussaud H., 9 rue des Loges), et à
Saint-Nazaire (magasin de musique et d’instruments Javelet 4 rue Thiers, et
Mme Henry 23 rue Thiers) (¹⁴)(¹⁵).
PRODUCTION À défaut de données plus précises, le nombre d’instruments sortis de la manufacture et la date de fermeture de celle-ci est très incertain. Á partir de quelques rares éléments, on peut estimer la production globale entre 1847 et 1940 à environ 15 à 18000 instruments (un instrument de VUILLEMIN-DIDION portant le n°14672 daterait des années 1935 d’après le placage « art déco » en « soleil » du panneau supérieur), parmi lesquels ceux de LÉTÉ et DIDION en représentent environ 3000 à 3500. De cette dernière estimation, la production de LÉTÉ et de DIDION devait être de l’ordre 50 au début à 150 instruments par an vers 1895. Les meubles paraissent de très belle facture et finition, équipés de bougeoirs jusque dans les années 1930. VUILLEMIN-DIDION lance le modèle « Armor » qui fera longtemps date dans sa production. Les instruments les plus récents sont à un seul panneau supérieur délimité par des moulures droites, cintrées ou galbées. La construction de nouveaux ateliers et bâtiments à Chantenay en 1924 devait certainement se justifier par une augmentation de la demande et d’une intensification de la démarche commerciale. La manufacture semble avoir existé jusque que vers 1940 et le magasin rue Santeuil est encore mentionné en 1940 (¹⁴) pour la location de spectacles. A-t-elle passé le cap de la guerre 1939-1945 ? A-t-elle subi des dommages de guerre trop importants qui l’ont empêchée de reprendre en 1945 ?
VUILLEMIN-DIDION Mécène La famille VUILLEMIN était très ouverte au monde musical, en particulier par Louis VUILLEMIN, tant à Nantes que dans d’autres villes de Bretagne. À Lorient, une salle de concert portait le nom de VUILLEMIN-DIDION sans doute en souvenir de ses fonctions dans cette ville avant 1880. « La Société philharmonique de Lorient a donné samedi soir et dimanche après-midi en matinée un concert salle VUILLEMIN-DIDION au profit des réfugiés belges » (¹⁴).
VUILLEMIN-DIDION Editeur et co-auteur VUILLEMIN-DIDION a également été éditeur de musique, en particulier avec J. Rowies, 8 rue Pigalle à Paris, en 1910, pour les « Paillettes roses de Marie Charlotte Baudry (¹³).
Autres fonctions :
Parallèlement à la direction
de la manufacture de pianos, Charles VUILLEMIN s’est beaucoup investi dans
la vie publique, dans le commerce et les affaires nantais (3, 4, 16): Il n’a pu être établi si les familles LÉTÉ-DIDION-VUILLEMIN en ont été propriétaires. Au décès de Louis DIDION, sa veuve est dite « propriétaire » sans spécification s’il s’agit de l’immeuble et/ou de la manufacture. Dans les années 1920, les bureaux et salles d’exposition se trouvaient au 1° étage de l’immeuble. Au début des années 1900, VUILLEMIN-DIDION a acquis le magasin de musique de Mme Beledin situé 7 rue Sauteuil dans une rue voisine et dont l’arrière de l’immeuble pouvait probablement communiquer avec celui de la rue Crébillon. Il le destine à la vente de ses instruments. Les ateliers de fabrication n’ont pu tous être localisés. En 1894, ceux de DIDION se trouvent au 2 rue d’Erlon. D’autres adresses sont connues. En dernier lieu (1923-124), Ch. VUILLEMIN et son fils, investissent dans la construction de nouveaux bâtiments à Chantenay-sur-Loire.
ÉPILOGUE L’essor amorcé en facture de pianos par LÉTÉ et ses concurrents locaux grandira avec la prise en main de l’affaire de LÉTÉ par Louis DIDION, neveu par alliance de LÉTÉ. Celui-ci fera de l’affaire une petite manufacture, largement développée à partir de 1898 par C. VUILLEMIN, le gendre de L. DIDION. Cette manufacture familiale a quasiment dominé sur la facture de pianos à Nantes et dans l’ouest de la France pendant près d’un siècle. Cette grande maison nantaise a pu résister à une concurrence locale représentée par plusieurs facteurs-fabricants de pianos qui, bien que dans l’ensemble d’importance moindre, se sont progressivement installés à Nantes. Ces ateliers et manufactures ont cependant conféré à Nantes un rôle important en facture de pianos dans l’ouest de la France, comparable par exemple, un temps, au pôle nancéien avec STAUB, MANGEOT, KEISER, FOLTZ et BARTHELEMY, METZNER et JACQUOT parmi lesquels tous n’étaient cependant pas des fabricants attitrés.
RÉFÉRENCES
(¹) -
www.luthiers-mirecourt.com et www.luthiers-mirecourt.com
/jacquot2.htm
SAUZEAU René Jean et Auguste
René Jean SAUZEAU semble
assurer la transition entre l’Ancien Régime et la période napoléonienne et
fait donc partie des premiers facteurs d’instruments et de pianos et
marchands de musique de Nantes au début du 19° siècle. Son fils SAUZEAU
Auguste, professeur de musique, puis compositeur de musique, lui succèdera
au magasin comme marchand de musique.
Il aura deux fils : René, né le 3 octobre 1798, qui deviendra
musicien et restera célibataire (+19/4/1858) et Auguste, né le 22 novembre
1801, qui a tout lieu d’être considéré comme le successeur de son père dans
l’affaire du magasin de musique. René Jean est décédé le 21 février 1834.
RÉFÉRENCES
(¹) - Archives municipales de
Nantes. Registres paroissiaux et Etat civil numérisés de Nantes 1760-1860.
LES GAMA
Signature de Gama Jean
Les origines de la famille GAMA sont à chercher à Fontoy (ca10 km ouest de Thionville en Moselle) où Jean GAMA est né le 22 octobre 1767, fils de Louis GAMA et Jeanne Raimond. Jean est venu s’établir à Nantes avant 1801, car en cette année il y épouse, le 1. Mars, Marie Anne Françoise Petit, tailleuse, née le 20/10/1775 à Nantes. Il se déclare alors menuisier résidant au Quai de la Fosse (5° canton) (¹). En tant que tel, il travaille peut-être chez un facteur de forte-pianos. La famille aura trois enfants : Ossian Edouard (o31/1/1802), Gustave Armand (o17/8/1805) qui se consacrera à la facture de pianos, et Charles Henri (o15/10/1807) qui deviendra chirurgien Major (1845). Ce dernier sera, en 1845, à l’origine d’une demande de rectification du patronyme « GAMAS » en « GAMA ». Jean GAMA développera son activité de facteur de pianos au 6 et 8 rue Jean-Jacques Rousseau où il décèdera le 1. janvier 1840 (1, 2).
Parmi ses collaborateurs il comptera son fils Gustave
Armand et Lazare Joseph Guilbaud, facteur de pianos, 31 ans en 1840. Selon
L. Verbeeck (³), Jean GAMA a déposé plusieurs brevets et a créé le
« Plectroeuphone (1827) (⁴), qui n’aura pas eu beaucoup de succès, sans
doute faute de relations suffisantes dans les cercles parisiens.
Gustave
Armand épousera le 16 mai 1849 à Nantes, Julie Françoise Cousseau, rentière,
dont il aura au moins un fils, Charles Henri né le 9 juin 1845 (reconnu en
1849). Un certain Jean François Cousseau, menuisier, témoin à la déclaration
de décès en 1823 d’un fils de Jean GEIGER, autre facteur de pianos de
Nantes, pourrait être en parenté avec Julie Cousseau. Gustave Armand GAMA
serait décédé en dehors de Nantes à une date indéterminée (¹). Charles Henri se dit marchand (1867), puis menuisier (1869). La qualification de facteur de pianos n’a pu être établie ; elle supposerait que la maison GAMA soit restée active bien après 1850, ce qui ne semble pas être le cas d’après les données de L. Verbeeck (³) et l’annuaire Didot-Bottin (⁵).
RÉFÉRENCES
(¹) - Archives municipales de
Nantes. Etat civil numérisé de Nantes 1793-1860.
Jean Michel LUPPERGER
Jean Michel Lupperger
réside déjà depuis quelques temps à Nantes lorsqu’il s’y marie le 21
mai 1806 avec Perrine Letourneux (*7.4.1812 à Nantes). Il était originaire
du Duché de Bade où il était né le 16 mai 1765 à Knielingen (près de
Karlsruhe), fils de Jean Michel Lupperger et Jacobine Bechtold (¹). De son mariage avec Perrine Letourneux, il aura trois enfants (1 ; 2) : Michel né le 2 juin 1806 qui deviendra Professeur de musique (1824). Serait-ce lui qui est l’interprète de la soirée musicale du 13 mars 1828 donnée sur le « plectroeuphone » de GAMA en 1828 à Paris ? (³). Julie née le 16 septembre 1809, décédée le 22 avril 1879 à Paris 18°, 13 rue de Maistre. La déclaration a été faite par son neveu par alliance Paul Hecquet-Brucker, 44 ans, négociant, neveu de Marie Virginie Hecquet, épouse de Michel Lupperger, professeur de musique). Marchande en 1830 (dans l’affaire du père ?), elle tiendra un cabinet littéraire à Nantes, puis aura, à partir de 1835, une brillante carrière de comédienne à Paris, Orléans, Versailles, Brest, Bruxelles (pseudonyme Melle Anna Luther : pourquoi ce pseudonyme alors que protestante d’origine elle s’était convertie au catholicisme ?). Sa fille naturelle Julie Amélie «dite « Amédine Luther » (*3.7.1830 à Nantes), épouse de Raphaël Felix, deviendra également une actrice renommée (Comédie-Française, Gymnase) ayant débuté dès l’âge de 14 ans dans les traces de sa mère, mais décèdera prématurément le 26 juillet 1861 (⁴). Elle a été inhumée au cimetière du Père Lachaise à Paris (⁵), ce dont on peut déduire qu’elle appartenait réellement au monde des artistes de talent.
Pierre Joseph Ferdinand né le 23 mars 1812.
Á son décès le 7 février 1868
à Paris 18°, 1, rue des Rosiers, il est marchand de journaux. La déclaration
de décès a été faite par Anatole Hippolyte Maubert, 56 ans pasteur de
l’Eglise évangélique (luthérienne), Grande rue de la Chapelle 39 (⁶).
De ces
deux re-mariages on ne connaît pas de descendants. L’annuaire Didot-Bottin
de Paris signale, en 1849, un « cabinet de lecture » tenu par la veuve
Lupperger au 50 Grenelle-Saint-Germain (⁷): serait-ce Andrée Chauvin, 3°
épouse de Jean-Michel Lupperger ou une homonyme parisienne?
RÉFÉRENCES
(¹) - Etat civil numérisé Nantes 1800-1892 et Paris (1840-1879).
Jean Baptiste GEIGER Jean Baptiste GEIGER est originaire de Sonthofen (ca 70 km SSW Augsburg) en Bavière où il est né le 1 janvier 1785, fils de Jean GEIGER et Agathe Merklin. Il est à Nantes avant 1815 car il y épouse le 21 juin de cette année, Louise Victoire Aubry, née le 1 septembre 1784 à Varades (Loire atlantique), lingère.
Á son mariage, il
est déclaré facteur de pianos, par la suite facteur de forte ou
forte-pianos. Il est installé d’abord à la rue Duquesclin (4° canton), puis
au 13 rue de la Contrescarpe (5° canton) jusqu’en 1843. Il a eu trois
enfants nés à Nantes : Louise Henriette (o3/7/1816), Hippolite Jean
Théophile (o1818 - 3/12/1823), et Henri Hippolite (o8/9/1822) qui deviendra
assureur maritime puis négociant (¹). Comme on ne note pas d’enregistrement de décès de Jean Baptiste GEIGER à Nantes et Chantenay, ni à Varades, entre 1840 et 1882, il semble qu’il ait quitté la ville pour une destination inconnue. La maison Rochet Frères semble avoir eu une existence assez courte, car elle ne figure plus à cette adresse en 1859 où on trouve la maison Petit au 6 et 8 rue de la Contrescarpe (⁴).
RÉFÉRENCES
(¹) - Archives municipales de
Nantes. Etat civil numérisé de Nantes 1800-1860.
Jean François SICARD
Parmi les plus anciens
marchands de musique et de pianos de Nantes, on note, entre 1820 et 1849, la
présence de Jean-François SICARD, marchand papetier, puis marchand de
musique et de pianos, voire facteur et fabricant de pianos.
François
Charles s’est expatrié à Haïti où il est décédé le 5 août 1862 à l'âge de 33
ans. En troisièmes noces, Jean François SICARD épousera le 10 février 1842 à
Nantes Adèle Joséphine Monnier (* 21 novembre 1822 à Nantes) (¹).
Il aurait également été fabricant de
pianos, sauf à considérer que la qualité de « facteur de pianos » ne
concerne que le travail d’entretien et accords. On ne connaît pas de plaque
d’adresse à son nom. S’il a créé un atelier de fabrication, celui-ci précède
de peu celui créé en 1846 par Dominique Joseph LÉTÉ au 15 rue de Crébillon,
jusque là luthier et marchand de musique. En 1847, la raison sociale en est
SICARD et Cie, ce qui suppose la participation de tiers dans son affaire.
RÉFÉRENCES
(¹) - Archives municipales de
Nantes. Etat civil numérisé de Nantes 1800-1860.
Jean Gustave ROUX Gustave Roux s’installe à Nantes entre 1856 et 1861 comme marchand de musique et de pianos, plus précisément en 1859 selon Robert (1886). Il aurait été formé chez des facteurs de pianos parisiens. L’attribution de récompenses aux expositions de Nantes en 1861 et 1882 (médaille d’or), de Voltri en 1878, Niort en 1882, Vannes 1883 et l’attribution de diplômes d’honneur, indique qu’il avait commencé la fabrication de pianos dès son arrivée à Nantes où il s’est installé 5 rue Boileau, soit 15 ans après la création de la manufacture de D. Lété et quelques années après celle de l’atelier de François Joseph Bressler, développée par son fils Napoléon Bressler. Les critiques considèrent qu’il n’a rien à envier à son concurrent direct Lété-Didion. En facture de pianos, Robert (1886) mentionne qu’à l’exposition de Nantes il a présenté quatre types de pianos droits se différenciant par leurs dimensions et le décor.
Les meubles sont très bien soignés. Roux a travaillé à
l’amélioration de la sonorité, de la puissance, la résonnance et à
l’homogénéité du mécanisme (à échappement libre à talon d'Erard). Il aurait
inventé un système d’étouffoir plus efficace que la sourdine par lequel seul
l’exécutant entend ce qu’il joue.
Commentaire sur l’exposition de Nantes de 1882 dans l’ "Officiel-Artiste”
RÉFÉRENCES
(¹) - Verbeeck L. Le piano
français. www.lieveverbeeck.eu
Félix Alexandre MARÉCHAL
D’importance apparemment
similaire à celle de ROUX et de DIDION du moins avant 1880, la maison Felix
Alexandre MARÉCHAL était installée 8 rue Jean-Jacques Rousseau (5° canton)
entre 1864 (date confirmée par une plaque d’adresse de piano) et ca1925. En
1886, elle a partagé avec la maison ROUX les mêmes éloges à l’Exposition de
Nantes selon lesquels elle ne déméritait pas par rapport à DIDION “hors
concours” (¹). En fait, il se déclare « professeur de piano », en 1861, comme son frère aîné Louis Théodore (1835-1899), résidant rue Santeuil. Il abandonne bientôt l’enseignement musical en 1863 pour se consacrer à la facture de pianos et au commerce de la musique.
Il tiendra ces activités jusqu’à son décès le 17 juin 1897 (2,
4). On ignore le nombre de pianos qu’il a pu fabriquer dans son propre
atelier ou s’il achetait des instruments chez d’autres fabricants auxquels
il apposait son nom. Il ne s’est jamais qualifié de fabricant de pianos
comme d’autres facteurs-fabricants de pianos. En effet, celui-ci se dit « propriétaire » lors de son mariage (18/1/1897), ce qui suppose qu’il n’a pas suivi de formation en facture de piano, mais se qualifie peu après « facteur de pianos » à la déclaration de décès de Félix Alexandre en juin 1897 ; il serait « sans profession » en 1901. Il tient l’affaire en 1922 sous la raison sociale « Cheminant-MARÉCHAL » (¹), l’associé « MARÉCHAL » étant très probablement son épouse Laurence Joséphine. Le fils d’Alexandre MARÉCHAL, Stéphane Adolphe (*20/*11/1868 Nantes), est devenu accordeur de pianos (1891), mais ne résidant plus J.J Rousseau, on ne sait s’il s’occupe aussi de l’affaire.
RÉFÉRENCES
(¹) - Verbeeck L. Le piano
français. www.lieveverbeeck.eu
Les Frères LEROUX Fernand Jacques Frédéric LEROUX (*6.6.1862 Nantes), enregistré en 1896 au 3 rue de Bréa comme Réparateur de pianos, et son frère (? Auguste Henri Marie LEROUX 17.6.1859, comptable) s’installent comme réparateurs puis facteurs de pianos en 1864 sous la raison sociale « LEROUX Frères, Facteurs de pianos » (1, 2, 3). Á Nantes, ils auront successivement diverses adresses : 11 et 14 Place Royale (1903, 1905, 1908), 7 rue du Calvaire (1907, 1910), 6 rue Copernic, 10 Cassini (1913, 1915, 1929) et 23 rue Racine près de l’Apollo (1913). Les frères LEROUX produiront et vendront des pianos sous leur nom « LEROUX Nantes » ou « Fernand LEROUX », présumant que Fernand est le principal acteur de la maison. En 1901, il se dit « Industriel », 11 Place Royale, tandis qu’en 1915, il se qualifie comme « Facteur, accordeur, lutherie, musique, vente, location. Atelier de réparation pour pianos, lutherie et autres instruments.
Conditions spéciales pour les membres des Amicales de
l’Union fraternelle ». Dès 1897, les LEROUX ont une succursale à
Saint-Nazaire au 19 rue de l’Amiral Courbet, ville dans laquelle L. DIDION
dispose également d’un représentant chez Danays, rue Thiers. Jacques LEROUX ne résidait pas au domicile familial en 1921, laissant supposer qu’il était alors à Paris, travaillant chez Erard ou Gaveau, ce qui explique aussi son mariage dans la capitale en 1922. Il tenait encore la maison en 1922 sans que l’on sache cependant s’il fabriquait encore des pianos (¹).
RÉFÉRENCES
(¹) - Verbeeck L. Le piano
français. www.lieveverbeeck.eu
ÉPILOGUE Nantes et ses alentours constituent dès l’aube du 19° siècle une région précocement marquée par une vie musicale intense qui a permis un essor notable en facture de pianos. Ebauché par ses précurseurs (SAUZEAU, GEIGER, GAMA), cet essor est accentué par LÉTÉ et surtout ses successeurs Louis DIDION, puis Charles VUILLEMIN, qui transformera l’atelier en une véritable manufacture. Celle-ci a quasiment dominé la facture de pianos dans l’ouest de la France pendant plusieurs décades. Les autres facteurs-fabricants qui ont exercé leurs talents à Nantes à la même époque étaient sans doute plus modestes et ont eu un rayonnement moins important, sans pour autant démériter dans leur activité. Le pôle nantais se place de ce fait parmi les provinces les plus productives en facture de pianos du pays et ce malgré une prééminence de la facture parisienne.
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