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GUILLOT
à Paris (°1873)

1880

LES PIANOS

"PARIS est sans contredit le grand centre de fabrication des pianos ; et il est permis de dire, sans crainte de se tromper, que les pianos français jouissentdans les deux mondes d'une réputation bien méritée. De tous les membres de l'harmonieux empire des instruments de musique, les pianos tiennent aujourd'hui le premier rang, autant par les ressources qu'ils offrent aux musiciens en permettant une réduction, satisfaisante de l'orchestre, que par la variété de leurs sons.

Le piano doit son immense popularité à des avantages qui lui sont particuliers: c'est le seul instrument qui donne en même temps le chant et l'accompagnement, c'est aussi un instrument qui tolère une certaine médiocrité qui n'est plus permise avec le violon ou la flûte.

Un bon exécutant, sans être un virtuose de premier ordre, peut, déjà produire, avec l'aide d'un bon piano, certains effets et peut arriver à charmer l'oreille par une juste inter-r prétation.

Peu de personnes se font une idée bien exacte du rôle considérable que joue en France la fabrication des pianos; d'après des statistiques sérieusement établies, on peut estimer à près de cent millions de francs le chiffre de la production des pianos en France seulement, et il n'y a pas moins de 20.000 professeurs de piano dans la seule ville de Paris.

Il y a un siècle, le piano était pour ainsi dire inconnu! En effet, M. Fétis rapporte le texte d'une annonce extrêmement curieuse, faite à Londres en 1767, et conçue en ces termes :

« Après le premier acte de la pièce, Mlle Brichler chantera un air favori de Judith, accompagné par M. Dibdin, sur un instrument nouveau appelé pianoforte. »

Avant d'examiner les pianos français, nos lecteurs nous permettront un retour dans le passé de manière à pouvoir parler de l'origine des pianos.

Les aïeux du piano, ce sont les instruments à cordes de l'antiquité, c'est la lyre, la cythare, le barbiton.

De ces divers instruments de l'antiquité, se forme le psaltérion qui fut très en vogue au moyen âge. Du psaltérion, naquit un instrument nommé nable, qui déjà se rapproche du principe de la construction du piano. C'était une caisse de résonnance, de forme triangulaire, ayant un bout plat ou arrondi, et sur laquelle de dix à seize cordes étaient tendues. On en jouait ordinairement avec les doigts.

C'était l'instrument de prédilection des ménestrels et des chanteurs ambulants, qui lui donnèrent le nom de psalter. Puis vinrent la citole, le clavicytherium et le clavicorde.

Le clavicytherium fut le premier instrument au quel on appliqua un système de clés pour en faire résonner les cordes. Vers la fin du xvie siècle, on vit se répandre l'usage du manicorde ou manicordion et de l'épinette qui donna, naissance au piano.

On a quelques bonnes raisons de croire que le piano est une invention italienne, bien que son inventeur présumé, Bartholomeo Cristofoli, de Padoue, n'ait publié sa curieuse notice : Gravicembalo col piano et forte, que quelques années après la présentation à l'Académie des sciences d'un clavecin à marteau construit par un facteur du nom de Marius (1716). Le nom de piano-forte, employé dans la notice de Cristofoli, devint celui de l'instrument, et n'a été que tout dernièrement abrégé, en celui de piano. Mais ces premiers essais de pianos étaient tout à fait informes et n'obtinrent aucun succès.

Godefroy Silbermann, de Freibeug. donna la première vogue au nouvel instrument grâce aux perfectionnements très-sérieux qu'il apporta dans leur mécanisme et leur sonorité.

Aujourd'hui, pour trouver de bons instruments du nouveau type au milieu d'une multitude de médiocres, et de mauvais, il est nécessaire de s'adresser à quelque maison sérieusement fondée et intelligemment, érigée.

Pour présenter et pour recommander à nos lecteurs, d'une manière toute spéciale, une maison qui a la réputation de très-bien faire dans la fabrication des pianos, nous avons prié M. A. Guillot de nous faire visiter ses magasins et ses ateliers, situés 23, rue des Filles-du-Calvaire.

On peut trouver là ces beaux instruments si recherchés des véritables amateurs où les basses très-étoffées n'ont plus ces sons voilés, ni les dessus ces sons maigres, exigus, si agaçants dans la presque totalité des pianos modernes.

Le bon goût de la forme est aussi une question importante dans un instrument, meuble désormais indispensable de tous les salons, et tout facteur sérieux est tenu d'apporter, comme le fait M. Guillot, l'attention la plus scrupuleuse au choix dit bois, à l'élégance et à l'exécution véritablement artistique du dessin.

Toutefois, c'est à l'instrument que les artistes donnent leur principale attention.

Parmi bien des perfectionnements introduits dans la fabrication des pianos par M. Guillot, nous en citerons un qui a une importance capitale : au lieu de scier le bois, comme on le fait ordinairement, M. Guillot le fait fendre, de manière à conserver toutes les fibres du bois, et à ne rien perdre, par conséquent, de la sonorité.

Les pianos de M. Guillot, droits, demi-obliques et grands obliques, ont été vus, examinés dans les moindres détails et essayés par nous. Pour reconnaître la supériorité incontestable des pianos de M. Guillot, le jury de l'Exposition universelle de 1878 lui a décerné une médaille: c'était la première fois que la maison Guillot prenait part à une exposition.

Homme d'initiative et de progrès, soucieux avant tout d'une fabrication irréprochable, M. Guillot mérite l'une des premières places parmi nos grands tacteurs de pianos. - STEVENS." Le Panthéon de l'industrie : journal hebdomadaire illustré, 1880, p. 126 (gallica.bnf.fr)

GUILLOT
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Pour les références voyez
pianos français 1850 - 1874


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