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Facteurs de pianos en France
1839
Les travaux de M. Challiot
sont le fruit d'une longue expérience qui s'est transmise de père en
fils, car l'art du luthier est héréditaire dans cette famille depuis
plusieurs générations.
Son fils,
Il exposa, en 1825, des harpes construites sur ce principe, qui
se firent remarquer, en onire, par un mécanisme particulier adapté aux
pédales.
Encouragé par l'approbation de jury, qui lui décerna une
mention honorable, il se présenta, en 1827, de nouveau avec des harpes à
double mouvement, imitées également de celles d'Érard dont le brevet,
pour ce double mouvement, venait aussi d'expirer.
Cette fois il reçut la
médaille de bronze. Cet artiste est mort au mois de février dernier. Cet instrument est, de
tous, le plus sujet à l'influence des variations atmosphériques qui,
agissant sur les cordes, les fait souvent monter et les force à se
rompre par suite d'une trop forie tension. On cite le fait d'un
professeur distingué, lequel, voulant prendre un matin sa harpe, n'y
trouva plus que six cordes sur quarante deux. Pour éviter l'inconvénient
dont nous parlons, on n'aurait, il est vrai, qu'à détendre les
cordes avant de mettre la harpe au repos. Mais quel travail alors
pour remonter plus tard ces mêmes cordes une à une au ton, lorsqu'on
veut de nouveau se servir de l'instrument !
Ce ne serait donc que changer
un inconvénient pour un autre, et mieux vaudrait sans doute
s'abandonner au hasard et risquer la rupture qui peut survenir, et
qui, n'étant pas toujoui s aussi considérable que celle qu'éprouva
le malheureux professeur, peut se réparer en moins de temps et avec
moins de fatigue qu'il n'en faudrait pour accorder l'instrument en
entier.
Il s'agissait donc de trouver
un autre moyen, celui de pouvoir détendre et retendre toutes les
cordes à la fois et d'une manière facile.
C'est ce que M. Challiot
est parvenu à faire à l'aide d'un procédé si simple qu'on s'étonne
de ne pas l'avoir vu employer plus tôt. Voici en quoi il consiste. Dans les harpes de M.
Challiot la console et la colonne sont rendues indépendantes de la
table d'harmonie, de sorte que la colonne, sans cesser de faire
corps avec la console, reste mobile et peut être penchée en avant ou
en arrière, suivant le besoin. A cet effet, l'arête de la base de la
colonne est appuyée sur une charnière qui permet de lui faire
exécuter ce mouvement sans fatiguer la terrasse.
Pour régler cette marche, un
autre changement devenait nécessaire.
Ainsi, au lieu d'attacher la
culée de la console à l'extrémité supérieure du corps d'harmonie
avec des chevilles de bois, comme on le fait habituellement, M.
Challiot se sert d'une vis de rappel qui, traversant la culée, fait
marcher deux goujons de fer fixés à l'extrémité supérieure du corps
d'harmonie, et qui force ainsi le montant à se rapprocher de la
table ou à se porter plus ou moins en avant.
Cette vis, dont la téle
est entièrement semblable à celle des chevilles, se tourne à volonté
avec la clé qui sert à monter les cordes. En la tournant à gauche,
elle ramène en arrière la console et la colonne, et diminue par
conséquent l'angle de tension que les cordes forment avec la table
d'harmonie. Une diminution d'un seul degré dans cet angle fait
baisser les cordes aiguës de quatre tons, et les autres
proportionnellement. Pour les remonter au ton qu'elles avaient, on
retourne la vis en sens contraire. Plusieurs personnes ont
cru que les cordes se détendant d'une manière égale, l'instrument
ainsi haussé ou baissé à volonté conservait parfaitement l'accord :
c'est une erreur. Peut-être un jour tentera-t on de résoudre ce
problème, ce qui sera bien difficile, peut-être même impossible;
mais il ne faut désespérer de rien à une époque où l'on est parvenu
à faire un instrument de musique qu'un sourd peut accorder.
Toutefois, dans l'état actuel
des choses, les cordes de la harpe de M. Challiot, étant remontées
après avoir été baissées pendant le temps de repos, ne perdent que
très peu leur accord, et il suffit de le repasser pour lui rendre
toute sa pureté. Les harpes à remonteur (tel
est le nom que M. Challiot a donné à son mécanisme) présentent donc
un avantage réel en empêchant cette fréquente rupture des cordes,
qui faisait le désespoir des harpistes. Aussi la Société
d'encouragement et l'Académie de l'industrie française ont-elles
décerné une médaille d'honneur à M. Challiot, qui s'tst garanti la
propriété de son invention par un brevet. M. Challiot annonce
pouvoir adapter son mécanisme à toute harpe quelconque à raison de
cent francs. Parmi les harpes exposées
par M. Challiot, deux se font remarquer particulièrement.
L'une est à six octaves et
demie, l'autre va même jusqu'à sept.
Nous ne voudrions pas que
cette dernière innovation trouvât des imitateurs, et nous espérons
que M. Challiot lui-même n'aura fait qu'un essai qu'il abandonnera
dans la suite. Si quelques facteurs de
pianos s'obstinent à porter l'étendue du clavier à sept octaves, il
ne s'ensuit pas que la harpe doive donner dans le même excès.
A quoi servent les dernières
cordes ajoutées dans le dessus qui, vu leur peu de longueur, ne
peuvent convenablement vibrer et ne rendent qu'un son sec et peu
agréable à l'oreille ? Dailleurs la construction
de cette harpe a dû subir quelques modifications à cause d'une
difficulté qui se présentait et que M. Challiot n'a pu vaincre qu'en
changeant la disposition des cordes. Comment la main droite,
déjà si gênée pour atteindre la sixième octave, aurait-elle pu
attaquer la septième ? M. Challiot, prévoyant cet
inconvénient, a placé les cordes à droite au lieu de les placer à
gauche, comme elles le sont dans toutes les harpes, changement qui
permet aux doigts de la main droite d'atteindre les dernières cordes
avec moins de peine et sans trop s'allonger.
Ce nouveau système provoquera
sans doute d'autres objections dans lesquelles nous n'entrerons pas
ici, persuadés que nous sommes qu'abandonnant les notes aiguës de la
septième octave M. Challiot rentrera dans le système ordinaire.
Quant à la facture de cet
instrument, nous n'avons que des éloges à lui donner. Il se
distingue non moins par la qualité du son, dont la puissance est
remarquable, que par les ornements qui sont d'un goût exquis.
La colonne est torse et
décorée dans le style gothique avec un triple rampant de feuilles et
de grappes qui les espacent. Toute la harpe a une
teinte d'ivoire, ce qui est fort doux à l'oeil et se marie bien avec
les dorures et les filets qui forment les panneaux. La harpe à six octaves et
demie se fait aussi remarquer par les ornements en style gothique
qui ajoutent à la valeur de l'instrument. Pour obtenir un plus grand
volume de son, M. Challiot a calculé de nouvelles épaisseurs dans
les tables qu'il a prolongées jusqu'à lu partie antérieure de la
harpe. Les notes basses surtout ont gagné à cette nouvelle
disposition. Ajoutons encore que les
pédales aussi ont subi une modification qui en rend l'usage plus
commode.
En général M. Challiot
exerce son art avec un zèle qui mérite les plus grands éloges."
Revue et gazette musicale de Paris,
Volume 6, 09/06/1839, p. 180
1859
Ils sont très-bons, leur sonorité est excellente.
L'un d'eux, en bois de rose, brillamment incrusté, semble, par sa forme
basse, destiné aux chanteurs qui s'accompagnent et dont il laisse voir toute
la personne.
Pour ne pas perdre par cette petite forme la sonorité, il a
fallu retrouver la longueur des cordes à l'aide d'une grande obliquité,
difficile à réaliser.
Mais cette difficulté a été heureusement vaincue :
c'est là une heureuse innovation."
Revue des Races Latines, 07/1859, p.
384 (gallica.bnf.fr)
Pour les références voyez la page
Aujourd'hui son fils, M. Etienne
Challiot, expose
plusieurs harpes tant à simple qu'à double mouvement.
Rien n'a été innové dans le
mécanisme qui est parfaitement exécuté sur les modèles que M.
Challiot s'est proposé de reproduire.
Mais il a appliqué à ses
harpes un perfectionnement dont les amateurs ne manqueront pas
d'apprécier l'utilité et dont nous allons nous occuper.
alphabétique C