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Ignace PLEYEL
à Paris (°1807)

CORDES

1811

SÉANCE DU LUNDI 3 JUIN 1811.

"Au nom d'une Commission, M. Charles lit le Rapport suivant sur les Nouvelles cordes métalliques de M. Pleyel :

« M. Ignace Pleyel, depuis longtems avantageusement connu du public par ses compositions musicales et ensuite comme facteur de piano-forte, vient de former une nouvelle fabrique de cordes métalliques propres à ces instrumens pour lesquelles il a pris un brevet d'invention en Janvier dernier; désirant maintenant constater par un Rapport de l'Institut les qualités de ces mêmes cordes, il nous en a présenté divers échantillons que nous avons soumis à l'expérience.

« On sait que jusqu'à présent on n'avoit fait en France que des essais infructueux pour remplacer les cordes métalliques de Nuremberg dont les fabriques fournissoient, presque à elles-seules, à la consommation générale de l'Europe.

Soit impéritie de la part des nouveaux fabricans, soit préjugé du côté des consommateurs, ces derniers avoient toujours répudié ces cordes et s'en tenoient constamment à celles de Nuremberg.

Ni ces vaines tentatives, ni ces préjugés n'ont découragé M. Pleyel et, après diverses recherches multipliées et dispendieuses, il est arrivé à des résultats assez satisfaisans pour n'avoir point à regretter les soins qu'ils lui ont coûtés.

« Dans les piano-forte l'on emploie vulgairement deux sortes de cordes; les unes .en laiton, les autres en fer. Dans les pianos destinés aux contrées de l'Amérique, où l'humidité et la chaleur sont excessives, plusieurs facteurs anglais n'emploient que des cordes de laiton et suppriment celles de fer trop faciles à se rouiller.

« L'étendue des pianos étant de cinq octaves, souvent de cinq octaves et demie, quelquefois de six, il en résulte pour ceux-ci 73 sons qui, à raison de 3 cordes par ton, font 219 cordes qu'il faut coordonner entr'elles de manière à former une succession chromatique sensiblement homogène en timbre.

On sent que la même corde, graduellement raccourcie, ne pourroit remplir ce long intervalle de cinq à six octaves; car si sa première longueur étoit de 1500 millimètres environ pour le fa grave, la longueur propre au fa plus aigu de six octaves seroit d'environ 22 millimètres, et dans ce cas, la corde, beaucoup trop rigide pour entrer en vibration, ne donneroit plus de son appréciable.

Les facteurs composent le système chromatique de leurs piano-forte de cordes différentes en matière, diamètre, longueur et tension. La matière est le laiton pour les deux premières octaves graves, et le fer ou acier pour les trois ou quatre autres octaves aiguës. La variation des diamètres est de sept numéros pour le laiton, et de six numéros pour les cordes de fer.

La longueur depuis la corde la plus grave jusqu'à la plus aiguë varie pour cinq octaves et demie dans la raison de 1480 70 millimètres ou environ 21 : 1. Les tensions de ces cordes sont d'environ 16 à 18 kilogrammes pour chacune des cordes graves, et d'environ huit kilogrammes pour les vingt dernières chromatiques aiguës.

« Nous n'entrerons point ici dans de plus grands détails sur les longueurs, diamètres et tensions de chacune des cordes de ce système. Nous en avons dressé une table, consignée dans le Rapport du 24 décembre dernier sur les pianos-forte de M. Schmidt, et nous y renvoyons.

Dans les résultats comparatifs des instrumens de différens auteurs, il se trouvera souvent quelques légères différences provenant de la longueur de leur diapazon et du poids des cordes dont quelquefois le numéro n'est pas précisément du même calibre mais cette table, faite d'après l'expérience, donne des bases et des termes de comparaison propres à faire trouver la raison même de ces petites différences.

Cette même table nous a servi à comparer les cordes de Nuremberg avec celles de la fabrique de M. Pleyel.

«Nous avons plus particulièrement soumis à l'expérience les numéros de ces cordes que nous savons être les plus fragiles, telles que les cordes en fer des numéros 2 et 3, et les cordes en laiton des numéro 0, numéro 2, 0 et; numéro 1.

« Chaque expérience comparée a été à l'avantage des nouvelles cordes. D'abord soumises à la même tension que celles de Nuremberg, elles ont donné à peu près le même ton; ensuite forçant leur tension, celles de Nuremberg numéro 3 fer a cassé à 11 kilogrammes. La nouvelle corde a cassé à 12 kilogrammes et demi; le numéro 2 fer Nuremberg a cassé à 13 kilogrammes le même numéro Pleyel a cassé à 14 kilogrammes le numéro 0 laiton Nuremberg a cassé à 14 kilogrammes; le même numéro Pleyel a cassé à 18 kilogrammes.

« Nous n'avons point soumis à l'expérience les cordes qui sont constamment infrangibles sous les tensions qui déterminent leur intonation ordinaire. Mais nous avons considéré ces mêmes cordes dans leur qualité de son et nous n'avons remarqué d'autres différences que celles qu'offrent souvent les cordes les plus homogènes.

Que l'on prenne une corde de 2 mètres de longueur, qu'on la coupe en deux, on croit avoir sans contredit deux cordes parfaitement homogènes et elles ne le sont pas.

Posées sur les mêmes chevalets côte à côte et tendues verticalement par les mêmes poids à l'exclusion de poulies de renvoi et mises en vibration, il est très rare qu'elles soient rigidement à l'unisson et qu'il ne faille pas ajouter quelques centigrammes d'une part pour les raccorder, et lors même qu'on a cet unisson, une oreille exercée et attentive discerne le caractère particulier de leur timbre.

C'est cependant ici l'homogénéité la plus parfaite qu'on puisse obtenir.

Mais pour peu qu'on examine la génération de ces cordes, on aperçoit aisément les causes de cette irrégularité:

La fusion et la cohésion inégale de leur alliage

L'inégale ductilité de leurs parties glissant par la filière;

La fausse cylindricité qui, dans la même longueur, fait varier la figure et le poids de cette longueur

Les points du chevalet sur lesquels elles sont fixées plus ou moins sensibles et fortuitement assis sur des fibres plus ou moins délicates de la table sonore. De là résulte que deux cordes supposées homogènes et parfaitement unissonnantes dans leur longueur primitive, cessent souvent de l'être lorsqu'un chevalet mobile les coupe par des sections régulières et égales.

Aussi faut-il les répudier jusqu'à ce qu'un heureux hasard en offre d'assez purs pour les expériences et les calculs du monocorde.

Mais ces considérations presque mathématiques ne sont d'aucune importance dans l'emploi ordinaire des cordes qui ne se touchent que dans leur plus grande longueur ou à vide.

C'est donc de cette seule manière qu'il convient de mettre à l'épreuve les cordes métalliques des pianos en général, il faut qu'elles aient une ténacité supérieure aux poids ou tensions qu'exige leur intonation que leur assortiment offre une série de numéros de calibres assez rapprochés pour qu'en passant d'un numéro à l'autre il n'y ait pas une sorte de saut trop brusque qui nécessiteroit des tensions trop inégales et altèreroit l'univocité des timbres.

«M. Pleyel a très bien rempli ces conditions. Ses cordes sont aussi sonores que celles de Nuremberg et elles ont une cohésion plus forte.

Cette qualité est si précieuse que, lorsqu'elle sera mieux connue du public, l'on finira sans doute par donner à ces cordes une préférence exclusive sur celles employées jusqu'ici en attendant, et vu l'utilité particulière de cette nouvelle fabrique nationale, nous invitons la Classe à lui accorder son approbation. »
Signé à la minute: Haüy, Charles Rapporteur.

La Classe approuve le Rapport et en adopte les conclusions."
Procès-verbaux des séances de l'Académie (Académie des sciences), 03/05/1811, p. 483 - Archives des découvertes et des inventions nouvelles, 1811, p. 265 - L'Esprit des journaux, françois et étrangers, 1811, p. 186-182 (archive.org) - Voir
Tobias SCHMIDT (°1785)

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